Est-ce parce que ce concept est “à la mode” qu’il faudrait ne pas en parler ? Eh bien, je vais faire le contraire : pour déjouer les fausses interprétations et les abus de langage autour de la notion de pervers narcissique, je vais tenter de la définir au mieux pour témoigner des ravages causés par une telle personne sur sa proie. En effet, le pervers narcissique ne fait pas souffrir tout le monde : il peut même être admiré voire adulé par certains, passer pour la personne la plus aimable et bienfaitrice qui soit. Ce n’est que sa victime choisie avec prédilection qui peut finir par le démasquer, au prix de souffrances indicibles endurées parfois pendant des années voire des décennies. Et fuir.
J’ai d’abord tapé “Pervers narcissique” dans le moteur de recherche le plus connu, et voici la définition apparue en premier et qui me paraît très pertinente :
“Le pervers narcissique aime faire passer sa proie pour une folle qui n’a pas compris. Il aime lui rappeler que sans lui, elle ne serait rien. Il est dans le déni et ne prend jamais la responsabilité de ses actes. Il se positionne toujours en victime et le problème ne vient jamais de lui.” (21 mars 2023)
Bien des choses sont dites dans cette définition. Je recommande aussi l’article suivant :
https://www.la-clinique-e-sante.com/blog/relations-toxiques/reconnaitre-pervers-narcissique
Et pour comprendre comment se comporte un pervers narcissique en couple, je conseille vivement de visionner le film glaçant mais édifiant “L’amour et les forêts” avec Virginie Efira et Melvil Poupaud.
https://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=301066.html
Si j’évoque ce type de personnalité aujourd’hui, c’est que je suis plus que lasse de voir ce genre de personne tenter de détruire celles et ceux qui me sont les plus chers, après avoir enduré moi-même plus que de raison leurs agissements pervers et destructeurs. Oui, j’en ai croisé de très près plusieurs dans ma vie, et leur œuvre de sape de mon être profond n’est pas encore tout à fait révolue. Observant les ravages causés dans la vie et le psychisme de la chair de ma chair, ma fille bien-aimée, par un conjoint pervers narcissique (disons PN), je mesure mieux leur emprise néfaste, le climat délétère qu’ils engendrent autour d’eux et dont moi-même, en proie à plusieurs PN parfois ligués entre eux pour annihiler ma joie de vivre, mon estime de moi-même et la quintessence de ma foi, j’ai eu à endurer l’acharnement continu contre mon âme pendant presque toute ma vie.
Extrait de l’article donné en lien ci-dessus :
“Ainsi, il est très fréquent qu’il utilise le gaslighting, une technique de manipulation mentale avec laquelle il cherche à faire douter sa victime de sa bienveillance voire, de sa santé psychologique.“
https://www.la-clinique-e-sante.com/blog/relations-toxiques/gaslighting-technique-emprise
Je pourrais citer des phrases types entendues de la part des pervers narcissiques qui s’en sont pris à mon équilibre mental :
“Tu n’es pas toujours très humaine dans tes jugements.”
“Tu es incapable de tolérance.”
Ces deux reproches-là, injustes et infondés, venus de deux personnes différentes s’en prenant aux deux qualités qu’il m’importait le plus de cultiver en moi-même (humanité et tolérance) ont amorcé pour moi le début de la descente aux enfers de la dépréciation personnelle, du doute existentiel et des prémisses d’une dépression ravageuse. Quand j’analyse ces deux reproches aujourd’hui, je me rends compte que le premier, émis par une femme nombriliste, dénuée d’empathie et éminemment critique sur autrui visait avant tout à me plonger dans sa propre problématique. Le deuxième est un abus de langage de l’homme qui partageait ma vie : la “tolérance” dont il me disait incapable, c’était en fait mon exigence morale face à lui, changeant, versatile et bien souvent hypocrite ou lâche. Je n’avais pas de complaisance vis-à-vis de son inconséquence, oui, cela est vrai. Ce qui ne remettait en fait pas en question ma qualité profonde de tolérance à la différence dans l’humanité en général. Mais jeune, vulnérable et sous emprise, je n’avais pas à ce moment-là de ma vie la force d’accueillir ce reproche comme abusif et infondé. Je l’ai pris au premier degré.
Il y eut d’autres phrases encore plus assassines de la part de cet homme auquel j’avais donné ma vie :
“Mon problème, c’est toi.”
(Conclusion habituelle de nos conflits conjugaux, quand je l’aiguillais vers une relation peu clarifiée et polluant notre couple avec sa propre mère).
“Tu es une femme qu’on ne peut pas aimer”.
(Ce qui représente tout de même le summum de ce qu’un époux puisse dire à son épouse, en se défaussant de son désamour personnel par un “on” !)
“Je n’y arrive pas… avec toi.”
(Justification de son manque de tendresse vis-à-vis de la conjointe pourtant absolument fidèle et parfois en demande de marques d’affection que j’étais).
Il y a eu tant d’autres dialogues destructeurs dans ma vie de couple que je ne me souviens même plus de tout. Le fait est que cet homme est parvenu, au bout de son invisible travail de sape, à faire croire à absolument tout notre entourage que j’étais malade mentale et bonne à interner, ce qu’il a fait avec grande facilité et autorité par deux fois, usant de ses relations dans le milieu médical. Il s’est alors résolument positionné en victime de la femme gravement délirante et persécutrice pour laquelle il me faisait passer, allant jusqu’à se lamenter sur son pauvre sort dans les bras de ses amantes suivantes une fois qu’il m’avait quittée à peine sortie d’hospitalisation, convalescente et chargée de la garde de nos trois enfants. Je dois dire que je me suis battue pour ne pas qu’elle me soit retirée, terrorisée à l’idée qu’il me fasse passer par-dessus le marché pour une mère indigne incapable de les élever seule en raison de ma supposée fragilité psychique.
Ce n’est pas de gaieté de cœur que je consens à ce déballage. C’est simplement pour témoigner de ce qui peut advenir dans un couple quand l’un des deux est résolu à déstabiliser jusqu’à l’effondrement psychique total son partenaire qu’un jour il a prétendu aimer. Certains s’en suicident, et cela aurait pu m’arriver. Ma foi et mon amour maternel portés au-delà de toute volonté propre m’en ont préservée. Tout le monde n’a pas eu cette force et cette chance. On peut se suicider, enfermé dans une relation toxique sans issue, quand le conjoint met une pression telle que la vie hors de sa nuisance n’est même plus envisageable. Ne reste alors plus que la mort comme ultime option de fuite.
Cet article pour mettre en garde les âmes candides contre les pervers narcissiques, hommes ou femmes, qui constituent environ 3 % de la population. Ils savent choisir leurs proies, souvent des personnes capables d’aimer, de s’adapter à eux, de leur renvoyer une image valorisante d’eux-mêmes, ce qui est leur unique quête. Ils ne désirent pas se donner et aimer, non, uniquement phagocyter autrui pour le vider de sa substance à leur profit. Et attention au moment où vous faites tomber leur masque : rien ne peut les mettre davantage en colère que la révélation de leur face réelle et peu valorisante. Leur masque est tout pour eux, leur réputation sociale leur est essentielle, puisqu’elle nourrit leur ego à la fois surdimensionné et défaillant. Ainsi, souvent, je pense à la traduction littérale des paroles de Dieu à Caïn juste avant le meurtre d’Abel, et je terminerai cet article là-dessus, en citant :
Gn 4, 5
et il était très abattu
Hébreu : wa-yippelou panaiw
Littéralement : « et ses faces s’écroulaient ». Caïn était en plein désarroi, bouleversé, décontenancé, abattu, prostré : il avait perdu la face. Cette expression se rencontre le plus souvent lorsque l’homme s’humilie en se prosternant à terre, devant Dieu (Gn 17, 3) ou devant un homme (Gn 44, 14 ; 50, 18), ou encore lorsque l’ennemi est humilié de sa défaite (Lv 26, 7 et 8).
Pour Caïn, la contrariété de l’échec est ressentie comme une atteinte à la personne intime : une brèche a été ouverte dans les murs de la citadelle où se tient la vie, véritable effondrement dans « les faces » de l’homme. C’est une perte grave, pour le « moi », pour la personne. Caïn éprouve douloureusement le vide creusé par cet arrachement d’une partie de sa substance : il ne peut plus s’y appuyer, le sol s’est dérobé sous ses pieds.
On peut compléter cette lecture psychologique de l’expression « ses faces s’écroulent », par une lecture théologique ou philosophique. Alors que son frère Abel lui apparaît en union intime avec Dieu (son sacrifice est agréé), Caïn éprouve le sentiment inconnu du vide laissé en lui par l’absence de Dieu, qui s’est retiré (son sacrifice n’est pas agréé). Dans le verset suivant, Dieu lui demandera d’assumer, de supporter, d’accepter cette souffrance (ne plus voir Dieu qui le comblait) en continuant de vivre avec cette absence. C’est la nuit mystique, la désolation. Dieu s’est retiré pour offrir à l’homme la liberté de le choisir encore, de monter en s’approchant plus près de lui. La souffrance est le prix à payer pour cette liberté.
Source article : https://www.hebrascriptur.com/Genese/k1n.html
Photo © Apirakthanakorn
1 commentaire
Hélas, la détection des PN ne s’apprend pas à l’école… C’est là tout le problème. Et puis, temporairement, nous sommes tous tentés, quand ça ne va pas, d’être le PN de l’autre. A bas bruit, nous le sommes tous en puissance, mais heureusement les choses se régulent. Quand ça devient un mode ordinaire d’être en relation avec les autres, là; c’est toxique et grave.