Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « On portera la main sur vous et l’on vous persécutera; on vous livrera aux synagogues, on vous jettera en prison, on vous fera comparaître devant des rois et des gouverneurs, à cause de mon Nom. Ce sera pour vous l’occasion de rendre témoignage. Mettez-vous dans la tête que vous n’avez pas à vous soucier de votre défense. Moi-même, je vous inspirerai un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront opposer ni résistance ni contradiction. Vous serez livrés même par vos parents, vos frères, votre famille et vos amis, et ils feront mettre à mort certains d’entre vous. Vous serez détestés de tous, à cause de mon Nom. Mais pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. C’est par votre persévérance que vous obtiendrez la vie. »
Luc 21, 12 – 19
Séquences de vie…
Mariée, je crois juste de partager à mon mari les fruits de mon oraison. Il les répète à tort et à travers, et de plus en plus, on va me regarder comme folle.
Je cherche désespérément à me confier à des prêtres, mais c’est mon mari qu’on écoute en priorité, et on me juge à travers ses dires à lui.
Sans m’en parler, il mobilise toute ma famille pour me faire interner. Le jour prévu, je suis si épuisée après une épreuve spirituelle majeure que je suis consentante. Je veux aller me reposer à l’hôpital. Mais la délégation familiale est là pour m’y emmener, et ce sera une hospitalisation sous contrainte, dans un service fermé.
Dans ma valise, des livres de sainte Thérèse d’Avila et saint Jean de la Croix. L’infirmier ricane en les voyant et me fait une injection en me disant : “Ça vous remettra les idées en place.”
Trois jours de nuit, je ne peux plus ni prier ni lire, à peine manger, et je n’ai droit à aucun contact avec l’extérieur. Trois semaines de descente au plus profond de la détresse humaine, au milieu de ceux qui souffrent tous les tourments de l’âme.
Vient le temps de la honte, des remords et de la dépression. C’est à moi-même que je n’arrive plus à pardonner. Un jour, mon psychiatre, touché par tant de mésestime de moi-même, me dit :
“Mais enfin madame, vous n’avez fait de mal à personne.”
Le mieux.
Le pire qui revient.
Le traumatisme de la profanation du cimetière juif d’Herrlisheim, qui me laisse à terre.
Le conflit conjugal à son apogée.
Nouvel étau qui se resserre autour de moi. Mon mari et mes beaux-frères s’entendent pour me faire interner une seconde fois.
Rendez-vous est pris à l’hôpital et j’insiste pour que mon mari y vienne aussi, car depuis des années, je suis la spectatrice privilégiée de ses propres troubles du comportement. Je me rends au rendez-vous, auquel il ne me rejoindra jamais. Lâcheté.
Le médecin que je rencontre n’est même pas psychiatre. Il m’interroge sur ce qui me préoccupe. Je lui réponds :
“La réconciliation entre Juifs et chrétiens.”
Son nom laisse à penser qu’il n’est ni l’un, ni l’autre.
Il ne me pose plus aucune question et décide de mon internement le soir-même.
Après, c’est la lente reconstruction de ma personne, seule, sans conjoint pour interpréter sans le comprendre ce qui se passe en moi. Le combat pour ne pas tout perdre en même temps que mon couple, pour garder les points d’ancrage essentiels à ma vie.
Bien plus tard, c’est la joie inouïe de comprendre, par l’oraison, tout ce que j’ai vécu jusque là.
Et le besoin irrépressible de témoigner.
Pour le Christ.
Et pour ceux qui souffrent et dont j’ai partagé la honte et la souffrance.
Alors oui, aujourd’hui, je sais que je n’ai pas à me soucier de ma défense.
“Il est proche, celui qui me justifie”. Isaïe 50, 8
Image : Enluminure de la lapidation d’Etienne
2 commentaires
Bonjour Véronique,
Je suis admiratrice de ton courage et de la hauteur de tes interventions sur ce site.
Je suis heureuse aussi qu’un internaute de religion musulmane nous ai rejoint
Espérons en Dieu pour tous
Bonne journée à tous
MG
Quand je lis et relis ton témoignage, je dis que le Christ en demande vraiment beaucoup à ceux qu ‘il chérit !
Tout mon être se révolte devant un tel raffinement de cruauté…
Comment as-tu pu pardonner ?
Te relire me fait frémir. Comment cele a-t-il pu être possible ?
Oui, tu sais mieux que quiconque que tu n’ as pas à préparer ta défense..
Personnellement, je ne pense pas à ma mort,
mais ce qui me préoccupe, c’ est celle des autres, plus jeunes que moi, et souvent beaucoup plus jeunes; Ils sont fauchés à l ‘improviste, sans s’ y attendre, sans s’y être préparés. Que moi, je sois toujours prêt, rien d’ étonnant à cela, mais eux, qui ont toute la vie à croquer, devant eux…
Et dire que si on pense à la puanteur du monde actuel, on passe pour des fous…
Ce qui devrait être anormal est devenu la norme..
Et ceux qui s’ en scandalisent sont bons à être enfermés.
La Croix du Christ , Folie pour les Gentils !.