Il y a beaucoup de mouvement, beaucoup d’empressement dans cette page d’Evangile. Dans une ambiance sombre où la nuit domine encore sur le jour, des personnes courent ; même, se précipitent : on sort, on rentre, on repart en courant… On court. Mais, est-ce que ça vaut vraiment la peine de courir ? Question saugrenue, direz-vous !
Je la pose tout de même, car il se trouve que nous aussi, nous courons beaucoup, et de plus en plus. Qu’en dite-vous ? Cette civilisation qui nous porte (et que nous formons) n’arrête pas, dans toutes ses composantes, d’augmenter les rythmes, de mettre la pression : les communications, le TGV, notre travail, la circulation, les avions, les rapports humains… Surtout il faut faire vite ! Plus vite, plus vite, Messieurs-Dames !
Tout s’enchaîne à une vitesse de plus en plus frénétique. Il ne faut pas « PERDRE SON TEMPS ». On nous dit que, de telle manière, « ON GAGNERAIT DU TEMPS». Ah ! D‘abord : qu’est-ce que cela signifie «gagner du temps » ? Il serait utile de se poser la question. D’autre part, il ne faudrait pas que ce temps supposé gagné soit ensuite employé pour… trouver le moyen d’aller, après encore plus vite ! Et pourtant telle est, aujourd’hui, l’impression que l’on a. Notre société, notre milieu de vie nous entraîne, nous pousse, nous tiraille, nous impose la mesure : impossible d’y résister ! Car, disons-nous, si nous faisons résistance, nous risquons d’être renversés. Et, le pire, c’est que cela n’est pas faux.
Ne croyez-vous pas qu’il faudrait avoir le courage de s’arrêter, de se poser autrement, de souffler, pour réfléchir, pour essayer de comprendre et… pour ne pas s’éloigner du chemin qui nous mène dans la bonne direction ? Je cite (sans contrôler ma source) un aphorisme de l’écrivain autrichien Arthur Schnitzler qui disait à peu près cela : « Mais où cours-tu ? Ne vois-tu pas que tu vas dans le sens opposé à ce que tu cherches et donc, que tu t’éloignes encore plus rapidement, de ton but ? ». Cette frénésie, cet emballement nous enlève souvent la lucidité nécessaire pour y voir clair et notre action désordonnée nous entraîne ailleurs.
Donc, frères et soeurs, la question : « courons-nous dans le bon sens ? » n’est pas superflue. Et il y a, c’est vrai, une mauvaise agitation, un mauvais empressement.
Mais, il y en a aussi un bon. ‘Je me dis qu’il faut absolument trouver le moyen, tout d’abord, de réfléchir sur nos choix de fond, pour, ensuite, se hâter, s’il le faut, pour faire des bons choix.
Dans notre page d’évangile, nous retrouvons les apôtres, enfermés, dans l’impasse ; plutôt «sonnés » (passez-moi le terme), terrassés par ce qui venait de leur arriver. Il faut dire qu’à leur place nous n’aurions pas su faire autrement ! Et la nouvelle apportée par Marie Madeleine, encore assez énigmatique, les oblige à se mobiliser, à se hâter, à courir, oui, à courir pour voir, pour comprendre un peu plus.
Ont-ils donc déjà perçu, soupçonné ? Non, à l’évidence : D’ailleurs, l’événement est tellement au delà de toute attente, tellement impensable, qu’il leur a fallu du temps pour entrer dans cette nouvelle perspective. Ressusciter des morts ? « … sur cette question nous t’entendrons la prochaine fois », disent à Paul les philosophes athéniens de l’Aréopage.
Mais, cette course de Pierre et de Jean nous révèle déjà une lueur dans les ténèbres : l’énergie nécessaire pour les dynamiser d’où vient-elle ? Et cette affirmation qui fait référence à Jean, au bout de la course : « Il vit et il crut » ne supposait-elle pas une espérance emprisonnée, un énorme désir enfermé quelque part ? Nous portons en nous ce désir puissant de VIE : la mort, bien que tragique, absurde, n’est donc pas définitive ! Nous le savons, maintenant.
Telle est notre joie en ce matin de Pâques. Cette course, cette « bonne course » vers le sépulcre vide nous entraîne vers celui que nous attendions depuis toujours, sans trop oser y croire.
Saint Paul, dans la Lettre aux Philippiens, utilise, lui aussi, la métaphore de la course : « je poursuis ma course pour tâcher de saisir, ayant été moi-même saisi par le Christ Jésus».
Que le Christ soit vraiment ressuscité, cela nous regarde tous : les apôtres, les femmes du récit et… nous, nous qui sommes ici pour entendre la proclamation de cet évangile, pour être confortés dans notre foi et pour pouvoir ensuite la transmettre aux autres…
La voilà la bonne nouvelle pour nous, frères et soeurs: le Christ est Ressuscité ! Oui, il est vraiment ressuscité !
Alors courons !
Dom Ginepro, Père Abbé
1 commentaire
Comme il m’ est bon, Seigneur, d’ avoir presque 86 ans et de passer mon temps à le perdre…
Il m’ arrive, pourtant, d’ oublier de me raser, et il faut que quelqu ‘un me rappelle à l’ ordre…
de classer mes papiers et d’attendre que mon bureau soit complètement encombré.
Tout cela n’ est pas important…
Mais qu’ est-ce qu ‘il y a d’ important ?
Une chose, de passer mon temps à rattraper tout celui que j’ ai perdu, pendant toute ma vie, à courir…
Et, finalement, je suis très occupé…
Je passe mon temps près de toi, Jésus, à prier pour toutes les intentions qu ‘on me confie, à prier pour ceux qui n’ ont pas le temps de prier. J’ essaie de tenir leur place auprès de Toi…
Avant, c’ était toute une histoire de réciter un chapelet.
Maintenant, je le récite, à la Grotte de Lourdes, chaque jour, à 15 h. 30, quand je n’ oublie pas.
Il m’ arrive de commencer à en réciter un, la nuit, quand je ne dors pas, mais sans garantie du temps que je vais y passer. Une heure, deux heures ? qu ‘importe ! Il m’ arrive de me réveiller deux heures plus tard et d’ en être toujours à me première dizaine.. Quelquefois, je le termine juste avant de me lever le matin, et ou même de me lever avant de l’avoir terminé..
Tous ceux qui m’ approchent ont peur que je m’ ennuie, quand personne ne vient me voir ! alors que je suis si bien tout seul, sans voir personne pendant 24 heures…
Heureusement que tu es dans ma vie, Jésus !
Qu’ est-ce que je n’ ennuierais sans Toi !
Finalement, qu’ est-ce que je suis occupé…
Je n’ ai jamais une seconde libre …
C’ est déjà cela, le Ciel… être près de Toi, dans l’ Amour du Père…