Dieu se lève et ses ennemis se dispersent,
ses adversaires fuient devant sa face.
Comme on dissipe une fumée, tu les dissipes ;
comme on voit fondre la cire en face du feu,
les impies disparaissent devant la face de Dieu.
Mais les justes sont en fête, il exultent ;
devant la face de Dieu ils dansent de joie.
Chantez pour Dieu, jouez pour son nom,
frayez la route à celui qui chevauche les nuées.
Son nom est le Seigneur ; dansez devant sa face.
Père des orphelins, défenseur des veuves,
tel est Dieu dans sa sainte demeure.
À l’isolé, Dieu accorde une maison ;
aux captifs, il rend la liberté.
C’est lui qui donne à son peuple force et puissance.
Ps 67, 2-3, 4-5, 6-7ab.36cd
Cet extrait du psaume 67, donné dans la liturgie d’aujourd’hui, me va droit au coeur.
Je voudrais en particulier développer mon ressenti sur la troisième strophe.
De tout temps, et cela est passé dans le langage courant, on a su que Dieu était du côté “de la veuve et de l’orphelin”. Et il en est toujours ainsi, d’ailleurs l’Eglise a su prendre le relais de cette antique connaissance sur Dieu et a toujours été compatissante pour les veuves et les orphelins.
Je voudrais cependant aller plus loin.
De nos jours, grâce à Dieu, les progrès de la médecine étant passés par là, il y a moins de jeunes veuves et d’enfants orphelins.
Mais il y a néanmoins beaucoup de femmes contraintes d’élever seules leurs enfants. Les temps ont changé, ce sont aujourd’hui les femmes divorcées qui se battent au jour le jour contre l’adversité, et là, force est de constater que l’Eglise n’a pas très bien pris le relais, du moins dans l’approche psychologique et spirituelle de leur situation – les oeuvres caritatives savent, je pense, être à leurs côtés quand il le faut.
Il n’est pas encore très lointain, le temps où le divorce était une honte absolue dans l’Eglise. Je me souviens, petite fille, au début des années 70, du scandale que représenta dans ma famille très pratiquante le divorce de ma marraine. On chuchotait autour de moi et je ne comprenais pas bien ce qui valait une telle disgrâce à ma marraine toujours si gentille pour moi. En grandissant, j’ai compris qu’elle avait fui un mari alcoolique. Y avait-il lieu de la blâmer ?
Et la vie passant avec ses joies et ses chagrins, ma génération ne fut pas épargnée : ma soeur se retrouva veuve avec deux enfants à 40 ans, et moi quittée par mon mari avec trois enfants au même âge. Ce qui finit pas aboutir à un divorce.
Eh bien, je n’ai pas été dupe de la différence de traitement entre elle et moi : beaucoup de monde s’est apitoyé sur sa situation et beaucoup moins sur la mienne. J’étais soupçonnée d’être responsable du départ de mon mari si affable en société. On le plaignait volontiers plus que moi. Il a fallu bien des années pour que mon entourage – et le sien – évoluent un peu dans la perception de ce qui s’était joué entre lui et moi.
Pour ce qui est de l’approche par l’Eglise – et au-delà – de la situation de ma soeur et de la mienne, contraste absolu : elle attira immédiatement la compassion sur elle – alors que peu intéressée par la foi chrétienne – tandis que j’eus à lutter pendant des années contre les préjugés négatifs. Quand un nouveau prêtre arriva dans ma paroisse après ces événements, pensant à moi pour me confier des responsabilités, il s’exclama en apprenant par une amie que j’avais peu de temps car j’élevais seule mes enfants : “Ne me dites pas qu’elle est divorcée !”
La comparaison s’arrête là, bien sûr je suis infiniment heureuse que mes enfants aient encore leur père, très proche d’eux affectivement et assumant son rôle, alors que mes neveux en ont été privés si jeunes.
Pour en revenir au psaume, ce qui m’y réjouit, c’est:
À l’isolé, Dieu accorde une maison
Garder notre maison a été le grand combat de mon divorce. Tout le monde ne comprenait pas. Mais cela allait bien au-delà du matériel, j’avais été très investie dans ce projet, depuis la construction, mon mari lui-même admit que je m’étais toujours impliquée à 90 % et lui seulement à 10. J’étais profondément enracinée dans ce lieu, y ayant en outre mon travail et ma paroisse, et des voisins charmants. Vendre, partir aurait été un crève-coeur. En faisant cela, nous aurions aussi amputé nos enfants de tous les lieux et les liens de leur enfance.
Alors j’ai choisi le long et difficile endettement. Mais quel soulagement quand je sus que je resterais ici !
Si j’évoque ce sujet aujourd’hui, c’est par compassion pour les autres femmes divorcées, car on sous-estime souvent la déchirure que représente pour elles la perte de leur maison. Tout perdre en même temps qu’un divorce, c’est très difficile.
Il m’a fallu aussi de longues années pour me délivrer d’une culpabilité que je portais à la pensée d’avoir en quelque sorte dépouillé mon mari de ce bien. Mais à bien y regarder, je constate qu’il a déménagé déjà quatre fois depuis notre séparation, c’est donc bien que les lieux lui importent beaucoup moins qu’à moi.
Alors aujourd’hui, je trouve la paix de la conscience jusque dans ma prière :
À l’isolé, Dieu accorde une maison
Merci Seigneur !
Image : Elie et la veuve de Sarepta Eglise Saint Pierre et Saint Paul, Orbais l’Abbaye Source : http://ndoduc.free.fr/vitraux/htm5601/bi_Sarepta.php
2 commentaires
Merci Denyse, ce commentaire ne m’étonne nullement, venant de vous. Chacun appréciera.
De grâce, ne comparez pas les souffrances des veuves et des divorcées, les veuves ne sont pas responsables de leur deuil…par contre il est bien rare que dans un divorce, chacun n’ait pas une part de responsabilité, et même comme dans plusieurs cas que je connais bien, ce sont parfois elles qui sont les seules responsables… Eh oui !