Cet après-midi, j’avais quelques courses à faire dans une petite ville, et je me suis arrêtée dans une belle église pour prier un moment. Je voulais me recueillir pour une amie qui souffre intérieurement. J’allume un cierge, et je m’assois dans la chapelle latérale pour prier devant une grande et belle icône de Marie et un crucifix.
Deux rangs devant moi, un monsieur, tout seul. Il prie à haute voix. Au début cela m’importune, je n’arrive pas bien à entrer dans ma propre prière. Arrive à ce moment-là un groupe de touristes, avec une guide qui parle très fort, et je ne parviens plus du tout à me recueillir. Cela dure un moment. Je me dis intérieurement, pensant à l’Evangile en Marc 11, 17 : “Vous avez fait de la maison de mon Père une maison de tourisme.”
Puis ils s’en vont. Le monsieur devant moi prie toujours à haute voix, chantonne par moments, d’une voix hésitante, un peu tremblante, comme le reste de son corps. Je me dis qu’il est des nôtres, de ce peuple des blessés de l’âme alourdis par les traitements psy que je connais si bien.
Sa curieuse psalmodie m’empêche de poursuivre ma récitation intérieure. Alors, comme je ne veux pas encore partir, je me mets à l’écouter, un peu gênée par mon indiscrétion. Mon aumônier de JOC, quand j’étais jeune, nous disait parfois: “La vie de chacun, c’est comme une terre sainte, il faut enlever ses chaussures et marcher lentement.”
Je pénètre dans la terre sainte de mon voisin de prière. Et là, j’entends :
“Porte l’Evangile et la paix de Dieu”.
Il le chantonne plusieurs fois.
Et puis d’autres cantiques encore, parmi mes préférés.
Emue, je quitte très silencieusement le banc, pour ne pas le déranger.
Le monsieur dans l’église a prié avec ses mots à lui, simplement, mais l’espace d’un instant, il a été pour moi la voix du Père…
5 commentaires
Un très bel article qui représente la réalité des églises durant l’été et en parallèle l’homme qui est là et qui est sourd à la rumeur de l’extérieur et qui est installé dans sa vie intérieure comme il est installé dans l’église.
clem
Hier, comme je connaissais tous les cantiques que chantonnait le monsieur, j’ai eu à un moment envie de me mettre à chanter avec lui. Et puis non, cela aurait été inconvenant, il n’avait peut-être même pas remarqué que j’étais là… On peut communier à autrui par la prière commune aussi, surtout dans une église.
Un beau témoignage, Véronique.
Il m’est arrivé d’intervenir auprès de gens, parfois comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, mais de m’apercevoir à quel point autrui avait soif d’un contact quelconque, et était heureux d’entendre une voix vive qui s’adressait à lui/elle..
Il y a une manière d’aborder l’autre, comme de tendre la main à un chat errant, qui laisse l’autre libre de s’emparer ou non de l’abord.
Mais trop de respect, trop de pudeur ne sont pas pas forcément un bonheur non plus quand il y en a tant qui n’osent pas aborder autrui à l’heure actuelle.
Et quand il y a tant de solitude.
Merci pour ce beau témoignage. Eh oui, dieu nous rejoints toujours par des chemins inattendus !
Merci Véronique pour votre témoignage, et pour la comparaison de votre animateur JOC, que je vais conserver dans ma mémoire. Elle est très belle. Il m’est parfois arrivé, mue par de bonnes intentions, de chercher la relation, de m’intéresser aux autres, en parlant trop ou trop vite, avec le pied d’un éléphant dans un magasin de porcelaine et non avec le pas léger de celui qui rentre dans un sanctuaire..bonne soirée, Claire