J’ai une chance que je mesure, même si elle a ses à-côtés fatigants.
Je vis entourée d’enfants. Je travaille pour des enfants.
Fraîcheur de leurs sourires, de leurs bons mots, de leurs émerveillements simples et faciles à susciter. Je passe six heures de mes journées avec eux. Ils sont bavards et facilement dissipés, mais je ne peux pas dire que j’aie un métier ennuyeux et répétitif. Ils sont demandeurs de savoirs et d’apprentissages et il faut avoir du répondant. Ils se réjouissent de leurs bons résultats, s’assombrissent du manque de réussite, mais ils ne sont pas aigris. Ils se disputent et se réconcilient très vite. Ils aiment bouger, courir, rire autour de nous. Ils aiment raconter leurs petites découvertes et joies quotidiennes, une dent tombée et la-petite-souris-qui-est-passée, un troupeau de sangliers croisé dans la forêt, un lapin dans une cage depuis Noël. Ils s’impatientent de savoir qui va avoir la fève de la galette préparée ensemble le matin. Ils jubilent sous la couronne. Ils m’offrent un dessin coloré “Tiens, c’est pour toi Véronique.” Ils rient à gorge déployée quand je leur raconte les dernières bêtises de mon chaton. Ils se passionnent pour la vie de leurs correspondants d’un lointain pays où on vit très différemment d’ici. Ils guettent un mail presque miraculeux de là-bas, où il n’y a ni voitures, ni électricité, ni internet, le maître fait 30 km pour se connecter.
Ils virevoltent toute la journée.
Ils m’épuisent et ils m’enchantent.
Et quand le calme est revenu dans la classe, que tout le monde est parti et que la pile de cahiers à corriger m’attend, j’éteins les ordinateurs et je vois au passage qu’on a tapé, dans un jeu de mémoire orthographique, au lieu de saxophone, “saxofaune”…