Il y a un peu plus de douze ans, quand j’ai commencé à me servir d’internet, les forums étaient omniprésents. Cherchait-on un renseignement sur tel ou tel sujet, les moteurs de recherche nous guidaient vers un forum, et on pouvait se prendre au jeu de participer à la conversation.
C’est ainsi que je suis entrée en contact avec de nombreuses personnes qui souffraient comme moi à l’époque de troubles psychiques, qui s’interrogeaient sur leurs traitements, qui recherchaient de l’entraide qu’on pouvait trouver là. Des amitiés se sont nouées, les contacts ont débordé les forums, échanges de mails, coups de téléphone, discussions privées sur les réseaux sociaux, rencontres avec les meilleurs amis issus de ces échanges.
C’est ainsi que j’ai connu Cécile. Belle avec ses grands yeux tourmentés, inquiète, à la fois confiante et parfois fuyante, traversant les innombrables tempêtes de sa vie avec courage ou désespérance, se raccrochant à son art, car elle peignait avec un immense talent reconnu par le cercle de ses proches et au-delà… Nous aurions tant souhaité qu’il lui apporte la confiance en elle qui lui manquait souvent ! Que de fois j’ai pensé, devant des œuvres d’art contemporain, que le travail de Cécile était bien plus touchant, fin et expressif… J’aurais aimé pour elle cette reconnaissance de son art, je lui souhaitais qu’il lui permette de sortir de la grande précarité matérielle dans laquelle elle vivait…
Cécile était une femme à vif, tourmentée, inquiète de son avenir, mais tellement attachante ! Avec moi, elle aimait échanger, aussi, au sujet de sa quête spirituelle. Le catholicisme de son baptême la rebutait, elle aurait aimé se convertir au judaïsme, chemin bien difficile. Elle savait peindre comme personne le visage juvénile d’Anne Frank, s’indignait encore et encore de toutes les marques d’antisémitisme. Elle avait aussi, ces dernières années, trouvé dans la cause animale un autre combat.
Le combat de sa vie a eu raison de Cécile.
Elle a choisi d’y mettre fin la nuit de Noël.
Je suis infiniment triste, moi qui jamais ne lui ai tenu la main. Sa main d’artiste fragile qui ne peindra plus, mais puisse son œuvre lui survivre pour témoigner qu’il y a, dans l’art notamment, un au-delà admirable de la maladie psychique.
http://www.cecileambert.odexpo.com/default.asp?page=22995&lg=
Image : Portrait d’une amie, par Cécile Ambert
10 commentaires
J’ai acheté deux œuvres de Cécile Ambert et je suis très triste d’apprendre sa mort bien qu’elle ne me surprend pas puisque Cécile refusait toute compromission ce qui l’a petit à petit isolée. Pas assez riche pour continuer à acheter ses œuvres, j’ai un petit sentiment de culpabilité, surtout qu’elle avait repris contact avec moi après s’être fâchée avec moi. Mais je n’avais pas les moyens de l’aider éternellement. Elle s’était fâchée aussi avec une galerie belge qui devait exposer ses œuvres, j’ai alors compris que j’allais être le seul à acheter ses œuvres que j’aime beaucoup mais je ne pouvais pas cela. Elle aurait du se soigner, elle a fait ce choix, je le respecte bien que je le regrette. Bien triste vie, bien triste société qui maltraite sans égard ses enfants.
Bonsoir François, oui cela a été une tragédie. Cécile se soignait mais sa vie a été une longue lutte contre la maladie, une errance dans ses attachements, des volte-face, souvent. Elle a beaucoup souffert et aurait mérité d’être reconnue pour son talent. à nous de la faire vivre maintenant par le souvenir fidèle et la reconnaissance de son œuvre.
J’apprends ce soir, et si longtemps après, la triste fin de Cécile. Je suis triste mais pas étonné. Merci à vous d’être l’amie qui témoigne pour elle.
Aujourd’hui, 12 avril 2018 j’ai une pensée comme ça m’arrive souvent pour Cécile Ambert.je tombe à l’instant sur cet adieu de Marie Hélène à Cécile et je comprends qu’elle n’est plus. Qu’elle est partie .elle s’etait Arrêtée un dimanche de Printemps ….20.12 ou 13. Je ne sais plus d1ns le stand que j’avais alors au marché de la création Montparnasse.elle avait r3garde attentivement un portrait que j’avais peint de Antonin Artaud , et m’1vait dit soudain. Très vite , appelez de ma part « peigneurs de cometes » ils che4chent des portraits d’Artaud pour le livre qu’il préparent. Bernard L’Herbier plus exactement .elle était grave, discrète, je n’ai pas eu le temps de beaucoup lui parler je l’ai remerciée et elle était déjà partie, enfuie je pourrais dire.elle m’a laissé une impression fd’une forte et étrange personnalité , lumineuse aussi, j’ai pensé quelqu’un de rare.et ce soir un bon gros coup de blues……
Comme je vous comprends Christiane, Cécile ne pouvait laisser personne indifférent, bien qu’elle ait tant souffert de solitude et de manque de reconnaissance… Je pense à elle tous les jours, car ce portrait est chez moi. Blessure qui ne guérira pas… Je lui souhaite une postérité par son art. Merci à vous d’avoir laissé ce message ici, à sa mémoire.
Je recherchai comment recontacter Cécile, qui avait un talent extraordinaire en effet, et j’ai la chance d’avoir un portrait qu’elle m’a offert il y a plusieurs années. Portrait toujours en face de moi car il ressemble beaucoup à ma maman qu’elle n’a pourtant jamais vu.
Et je tombe sur votre message, par hasard…
Je suis peinée au-delà de tout mot possible d’apprendre que Cécile s’est suicidée.
Je sais qu’en effet c’était difficile pour elle, et c’est peu dire.
Mais nous avions perdu le contact et naïvement j’espérais que la peinture, qui commençait à bien démarrer pour elle, lui permettrait de trouver l’apaisement dont elle avait tant besoin.
Je suis vraiment très triste.
Et je confirme que c’est une artiste superbe.
Merci pour votre témoignage Marie-Hélène, oui, quelle tristesse, Cécile était une belle personne et son art méritait d’être reconnu. Je suis désolée que vous appreniez sa disparition par le biais de cet article…
Merci Véro, de cet hommage pour elle, alors que je ne l’ai pas connue. Les “grands” , dans le domaine artistique et littéraire notamment, sont souvent aussi les plus tourmentés. Un peintre très présent dans les musées de Vienne, Egon Schiele, peignait lui aussi admirablement à travers les corps l’imbrication tortueuse de la douleur, de l’isolement profond, de l’amour et de la mort.
Merci Véronique, les tableaux sont magnifiques, je paierai pour que votre amie Cécile consente à la paix..
Je prierai…