“L’amour n’est pas aimé”, disent de nombreux chrétiens à la suite de saint François d’Assise à qui cette parole est attribuée. On identifie ainsi le Christ ou notre Dieu Trinité à l’amour, et force est de constater que dans le siècle où nous vivons, ce n’est pas une majorité qui vit de la Parole de Dieu personnifiée en son Fils et de la référence à Dieu pour trouver en Lui le sens de notre vie. “L’amour n’est pas aimé”, autrement dit le Dieu d’amour, de miséricorde et de justice ne tient pas la première place dans le cœur de beaucoup de nos contemporains.
Je voudrais prolonger ce constat par un autre postulat : “La vérité n’est pas aimée.”
Jésus s’est lui-même présenté comme “le Chemin, la Vérité et la Vie”. (Jean 14, 6) Les chrétiens authentiques tentent de vivre de cette parole. Choisir de suivre le Christ-chemin pour accéder au Père, vivre de la parole de Jésus pour entrer dans la promesse de la vie éternelle. Défi de toute une vie ! Ce n’est pas toujours simple de tenter de se conformer aux commandements de l’Evangile, source de vérité. Ils sont à la fois un fardeau léger et une exigence radicale de cohérence dans l’amour, le don du pardon et la charité.
Concernant la vérité, le Christ Jésus a eu aussi cette parole très importante :
J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous ne pouvez pas les porter.
Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière. En effet, ce qu’il dira ne viendra pas de lui-même : mais ce qu’il aura entendu, il le dira ; et ce qui va venir, il vous le fera connaître. Lui me glorifiera, car il recevra ce qui vient de moi pour vous le faire connaître.
Tout ce que possède le Père est à moi ; voilà pourquoi je vous ai dit : L’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître.
Jean 16, 12-15
Jésus préparait ainsi ses disciples à la venue du Saint Esprit sur eux, ce qui se produisit effectivement cinquante jours après sa résurrection, événement dont nous faisons mémoire à chaque fête de la Pentecôte (Actes des Apôtres 2, 1-13).
Mais n’allons pas croire que l’Esprit a déjà tout révélé des mystères divins ce jour-là, et que désormais nous n’avons plus rien à en attendre. Jésus savait bien que ses disciples, et même après sa résurrection, ne seraient pas capables de tout porter de la vérité de Dieu. Ils ont reçu l’essentiel pour témoigner du Christ ressuscité et s’acheminer vers la rédaction des Evangiles, vers la proclamation de la bonne nouvelle du salut aux païens par l’apôtre Paul converti au Christ après une forte expérience mystique. Tout cela était absolument nécessaire pour asseoir solidement la foi des chrétiens et les bases de l’Eglise. Nous vivons encore de ces grâces aujourd’hui. L’Esprit a produit des merveilles dans les premiers temps de l’Eglise, avec force persécutions pour les premiers témoins qui recevront le nom de chrétiens.
Et de nos jours ? L’Esprit est-il toujours à l’œuvre ?
Oui bien sûr, et il a même fort à faire en ces temps où les églises chrétiennes sont très divisées et portent ainsi un certain contre-témoignage. Il a fort à faire car il y a toujours du neuf à comprendre dans la révélation divine. Ainsi par exemple, Jésus a vécu dans une époque, une religion et une société fortement marquées par le patriarcat. Il a pris beaucoup de risques en montrant toujours de la considération et du respect pour toutes les femmes qu’il a rencontrées sur ses chemins d’annonce du Royaume de Dieu. Il leur a même révélé, à elles de manière privilégiée, les mystères de sa messianité, que ce soit à la Samaritaine ou à Marthe et Marie de Béthanie, et encore la réalité de sa résurrection, à Marie de Magdala et à ses compagnes du matin de Pâques.
Comment pourrait-on alors imaginer aujourd’hui que le Christ n’ait plus rien à dire aux femmes et sur les femmes dans ces temps où elles ont acquis de nouveaux droits en occident tandis que d’autres civilisations veulent continuer à les réduire en esclavage domestique et à les maintenir sous la domination des hommes ? Les deux tendances s’affrontent de nos jours et se durcissent de part et d’autre.
Eh bien, pour ma part, je suis persuadée que toute une part des vérités que les disciples de Jésus n’étaient pas prêts à porter il y a 2000 ans – et c’est malheureusement encore le cas de nos jours pour de nombreux hommes religieux, même chrétiens – ces vérités concernent justement les femmes, leur place dans la société, les religions et l’économie du salut.
Or, pour faire entendre la voix de Dieu sur ces questions-là, choisirait-Il de dispenser l’Esprit Saint exclusivement ou de manière privilégiée à des hommes, qui justement résistent souvent à la volonté de Dieu dans la place faite aux femmes ? Si Jésus s’est révélé pour qui il était avec prédilection à des femmes – il est né d’une femme et non d’un géniteur masculin – il peut aussi révéler les mystères ultimes de Dieu, par l’Esprit, à des femmes contemporaines.
Mais que se passe-t-il alors, du moins dans l’Eglise catholique romaine ? Les femmes n’y ont aucune prérogative en matière de discernement des esprits : confidences en confession, à un évêque ou à Rome atterrissent automatiquement dans des oreilles masculines, qui traitent l’information selon des critères discutables car exclusivement masculins et liés à des pouvoirs dans l’Eglise. Et ainsi, bien souvent, quand l’Esprit s’exprime d’une façon qui déplaît à ces messieurs dans une hiérarchie bien huilée, avec un contenu qui les remet par trop en cause dans leur fonctionnement routinier voire dans une doctrine bien établie, on l’étouffe, on le brime, on lui oppose silence et mépris. L’argument ultime sera toujours qu’une authentique révélation de l’Esprit Saint suppose de celle qui la reçoit parfaite obéissance à l’Eglise dans ses représentants autorisés et sa doctrine. La boucle est bouclée et le serpent se mord la queue. L’Esprit doit se soumettre au sacro-saint catéchisme ! Et pourtant, le pape François répète souvent que “l’Esprit Saint ne peut être mis en cage”, mais dans le même temps rien ne change au Vatican quant au discernement des révélations privées.
J’ajoute encore qu’il n’y a pas que dans l’Eglise catholique romaine que l’Esprit de vérité ne soit pas aimé. Dans la société, la vérité n’est pas aimée non plus. Approchez-vous avec candeur en avançant que le Seigneur vous donne de recevoir de Lui des éclairages sur “la vérité tout entière” qu’il a pourtant promise à ceux qui croient en lui il y a déjà 2000 ans, les boucliers se lèveront aussitôt : “De quel droit prétends-tu connaître la vérité ?” “Il n’y a pas qu’une vérité ! ” “La vérité est déjà dans le dépôt de foi de mon Eglise !” ou encore : “Qu’est-ce que la vérité ?”
Et voilà, on n’a toujours pas progressé depuis Ponce Pilate…
Ce que je constate avec amertume, c’est que les croyants comme les non-croyants et parmi eux même ceux que l’on nomme “des chercheurs de vérité” ne veulent pas de la vérité quant elle est déposée par l’Esprit Saint dans une âme et un cœur autres que les leurs propres, et surtout pas quand elle dévie de leurs propres croyances et convictions. Chacun se veut maître de sa vérité, oubliant qu’elle est en Dieu de manière sûre et immuable, et qu’Il a bien le droit de la partager à qui Il veut et comme Il veut, par la puissance de l’Esprit. Mais quand bien même vous aurez eu le privilège insigne de communier profondément à cette Vérité dans le Seigneur, on vous contestera et on fera en sorte de ne même pas vous prendre en considération.
Non, la vérité n’est pas aimée.
2 commentaires
Bonjour Véronique!
C’est vrai que l’Amour n’est pas Aimé et que nous chrétiens parfois sommes responsables car nous ne montrons pas le visage du Christ qui nous habite. Mais suis de plus en plus peiné de voir que notre si belle église catholique est aussi un obstacle parfois pour ceux qui seraient attirés vers Jésus mais qui voyant certaines choses …se retirent. Et là je touche à La Vérité qui n’est pas AIME car l’aimer cela comporte se regarder en vérité… comme Dieu nous regarde. Tu parles bien de cet Amour vrai de Jésus pour le femmes. Déjà en son temps les femmes étaient bien cachés … on profitais d’elles comme lors des accusations et voulant dilapider Marie de Magdala …les grand prêtres…
un peu comme pour l’histoire de Suzanne… et Jésus prit sa défense. Car cette femme surprise parait il en flaggant délit, a su reconnaître son péché …Encore dans l’église aujourd’hui les femmes ont une toute petite part dans nos paroisses… le ménage, l’accueil – je l’ai fait- mais on sent bien la différence de relation de Mr le curé avec les hommes et les femmes alors que les femmes sont souvent celles qui font plus sauvent du volontariat. Puis comme tu dis c’est Marie =, une femme qui a été choisie pour l’accueillir, lui donner naissance, le faire grandir avec Saint Joseph mais l’accompagner aux pieds de la croix. Et parait il que c’est au j’avais connu au catéchisme ne se vaut pas … Marie ne serait pas co rétentrice avec son fils…je ne dis pas qu’elle nous a sauvé mais elle était bien là aux pieds de la croix. Bone soirée et courage pour le confinement. nani
Bonsoir Véronique !
Parfois je passe et je lis et, je me retrouve. L’Amour n’est pas Aimé ! Jésus qui a donné sa vie dans la croix pour nous, qui s’est fait homme pour nous, qui se donne dans l’Eucharistie pour nous …il n’est pas Aimé. C’est un mystère pour moi. Pourquoi le monde aime tout ce qui va être détruit un jour et pas L’AMOUR ? Bonne soirée Merci nani