Errance paroissiale.
En matière de pratique religieuse, j’ai toujours privilégié la fidélité et la proximité. A savoir, que je me rendais à la messe chaque dimanche, sauf empêchement majeur, dans ma propre communauté de paroisses. Bon an, mal an, j’y trouvais satisfaction de ma nécessité de célébrer l’eucharistie avec ces paroissiens auxquels je suis très attachée depuis plus de vingt ans et de ma soif de la Parole de Dieu.
Il a suffi d’un changement de curé pour tout remettre en question. J’ai tenu cinq ou six messes, que j’ai très mal vécues. Un prêtre sur la défensive, réfutant toute critique avant même qu’elles n’émergent, prêchant longuement de façon culpabilisante sans du tout connaître son public au préalable, avec une diction malaisée et un manque criant de recueillement pendant les transitions de la messe. Je ne saurais définir le malaise qu’il suscite, mais je sais que je ne suis pas la seule à en être complètement déboussolée. J’attends d’un prédicateur un minimum de cohérence biblique et de prise en compte de son auditoire. Je n’entends là que paraphrase et invectives, très peu de références scripturaires intéressantes et des admonestations qui ne conviennent vraiment pas à ces fidèles d’entre les fidèles continuant à venir et à servir contre vents et marées quand l’immense majorité de la population locale a déserté nos églises depuis bien longtemps déjà. Pour moi, incontestablement, il rate sa cible. J’ai passé des messes irritée, choquée voire au bord des larmes, ayant perdu jusqu’au goût d’y chanter. Pour finir par me dire que ce n’était pas le but d’une messe dominicale, et me résoudre à aller pratiquer ailleurs en ne restant fidèle qu’à celle qui a lieu de temps en temps dans mon propre village.
Hier, je me rends à une quinzaine de kilomètres dans l’espoir d’entendre le nouveau curé de cette paroisse-là. Pas de chance, c’était le vicaire installé depuis une bonne décennie, un prêtre déjà assez âgé connu pour sa bonhomie… et la vacuité de ses homélies. Messe dominicale pliée en cinquante minutes, dans une immense église abritant une petite trentaine de fidèles grisonnants, deux choristes et aucune ferveur palpable. Assurément, ce n’est pas là non plus que je comblerai ma faim d’eucharistie et de méditation édifiante de la Parole de Dieu.
Fort heureusement, il y a non loin de chez moi, par une route un peu tortueuse, un couvent où la liturgie est belle et recueillie. C’est donc là que je me replierai désormais.
Mais je ne peux m’empêcher de déplorer cet immense gâchis.
Je ne parviens pas à comprendre, à l’heure où les prêtres se font rares, qu’il y en ait tant qui n’aient pratiquement rien à apporter aux fidèles un tant soit peu exigeants en matière de contenu et de recueillement pendant les célébrations. Je suis assez fatiguée d’être cantonnée au mutisme ecclésial, écoutante passive par la force des choses car femme et laïque, alors que la Parole de Dieu est ma passion et le moteur de ma vie. Je me sens presque humiliée que ces prêtres-là prétendent être le passage obligé entre Dieu et moi, ceux qui vont me l’enseigner voire me le révéler, alors que ma foi explose mon cœur et que mon oraison est source continuelle de grâces et d’enseignement d’une toute autre teneur que cette platitude désespérante de nos célébrations.
Je me tiens là, muette et transparente, depuis presque vingt-cinq ans de pratique régulière, alors que le Seigneur verse en moi des torrents de compréhension de sa Parole dont rigoureusement personne ne se soucie dans les paroisses que je suis amenée à fréquenter.
Voilà comment, en Eglise catholique, on balaie d’un revers de la main les charismes que l’Esprit accorde aux non-ordonnés.
4 commentaires
Bonjour Véronique,
Et pourtant, si vous écoutiez Jésus, il avait d’avance prophétisé ce malaise et cette tristesse que vous ressentez aujourd’hui à l’Eglise : n’a-t-il pas demandé à ses disciples, via la Samaritaine, d’adorer le Père “en esprit et en vérité” et pas dans un temple, ni au Garizim (temple du Nord) ni à Jérusalem (temple du Sud) ? Où et quand Jésus nous a-t-il demandé de prier dans une église et d’y écouter les “subjectivités” des prêtres, même de bonne volonté ?
Voyez comme le Père vous fait courir de plus en plus loin de votre “chez vous” 😉
Amicalement,
Madeleine
Bonjour Madeleine,
J’ai toujours trouvé étrange que les personnes qui vivent leur foi hors de toute église fassent du prosélytisme pour leur propre choix. Cela vous rassurerait-il peut-être sur votre option personnelle que tous les chrétiens désertent leurs paroisses ?
Quant à m’objecter “Si vous écoutiez Jésus”, je trouve cela un peu péremptoire… Supposez-vous donc que je lui sois sourde ?
A travers l’histoire de l’Eglise, de grand(e)s mystiques nous ont laissé leurs témoignages : Catherine de Sienne, Thérèse d’Avila, Jean de la Croix, Elisabeth de la Trinité et tant d’autres… Ceux-là ont écouté le Christ Jésus comme personne, et quoiqu’ils aient eu à endurer en Eglise, le Seigneur ne leur a jamais demandé de la déserter, bien au contraire, leur mission était plutôt d’être ferments de réforme et de progrès au cœur même de l’Eglise.
Votre pseudo bon conseil ne me détourne donc guère de mes résolutions de demeurer fidèle à mon baptême. Jésus lui-même fréquentait les synagogues selon sa propre tradition religieuse. Ce genre de fidélité est un vertu, et non un égarement. C’est cet exemple-là qu’il nous a laissé.
Bonjour Véronique,
C’était seulement un conseil aimable. Je ne fais aucun prosélytisme, je ne fais que rappeler cette parole de Jésus en Jean 4:23 sur laquelle tout le monde s’assied complaisamment, depuis toujours. Le Maître savait combien un rituel peut risquer de suffire à certains fidèles, les exonérant de faire le chemin intime vers Dieu, chemin bien plus “étroit” et courageux que l’avenue codifiée des églises.
Non, cela ne me rassure pas de constater que beaucoup de chrétiens désertent leurs paroisses, car je préfère un croyant qu’un païen. Je pense que c’est un problème lié aux prêtres devenus peut-être trop “fonctionnaires”, comme vous l’avez bien démontré.
Désolée pour “si vous écoutiez Jésus”, je l’ai regretté d’ailleurs car j’aurais dû exprimer “si vous écoutez Jésus”.
Les grands mystiques n’étaient pas des pratiquants mais des ermites ou des isolés, pour beaucoup. C’est pour ça d’ailleurs qu’ils n’étaient pas influencés par la subjectivité d’autrui.
Jésus ne fréquentait les synagogues que pour y enseigner, pas pour y prier. A son époque, c’était inconcevable de prier dans une synagogue, puisqu’il y avait le Temple. Et Jésus a suffisamment témoigné qu’il priait seul.
Certains fidèles se plaignent des prêtres, mais qu’en est-il de la réciproque ?
Madeleine
L’Evangile dit ” La bouche parle de l’abondance du coeur”… Les prédications reflètent nécessairement le coeur de ceux qui les prononcent. Je n’ai jamais entendu un diacre prêcher. Ils ont pourtant été ordonnés pour ça ! Dans l’Eglise la parole est encore confisquée alors que tant de charismes restent muselés.