Un grand jour dans mon petit village d’Alsace hier dimanche 22 mai 2022 : sous un franc soleil, nous fêtions l’achèvement de travaux de rénovation intérieure et extérieure de notre jolie église présentant un clocher du XIIe siècle et une extension par une nef il y a exactement 200 ans. Cette réussite de plusieurs vastes chantiers et le bicentenaire de l’extension ont donné lieu à des festivités organisées conjointement par la municipalité et le conseil de fabrique, dont l’opiniâtreté et la bonne cohésion ont permis l’accueil pour l’office du matin et la journée de réjouissances de notre archevêque Mgr Luc Ravel, d’élus du terroir et de nombreux habitants ou voisins de notre cher petit village de moins de mille âmes.
La messe, très belle, a été rehaussée par la prestation d’une trentaine de choristes de la communauté de paroisses entraînés par notre excellent organiste. Nous avons eu la grande joie de revoir, aux côtés de notre nouveau curé, son prédécesseur qui nous avait ravis pendant trois ans. Et notre archevêque, dans sa très grande simplicité pétrie de proximité non feinte, nous a gratifiés d’une homélie de circonstance, dans laquelle il soulignait que même dans les temps difficiles et à multiples besoins sociaux que nous traversons, il n’était pas vain d’investir, même pour une petite commune et paroisse comme la nôtre, dans la patrimoine religieux immémorial, ce pour ne pas oublier, outre la dimension horizontale de nos interactions humaines, la dimension verticale de notre élévation spirituelle vers Dieu. Il relevait que dans ses années de curé de paroisse, il avait toujours été frappé par le contraste entre le nombre de fidèles s’amenuisant aux offices, et la présence constante de lumignons brûlant dans l’église au long des semaines, témoignant du passage quotidien de personnes en quête de paix, de silence et de méditation voire de prière dans ces lieux irremplaçables que sont nos églises. De quoi se persuader que l’église du village ou de la paroisse n’est pas que le site du rassemblement des pratiquants, mais bel et bien un lieu qui frappe immanquablement le regard de tout un chacun par les clochers s’élevant vers le ciel et la garantie d’un havre de paix pour toute personne en quête d’intériorité. Patrimoine précieux, coûteux, mais dont il y a lieu de se réjouir quand une bonne intelligence entre pouvoirs publics et ecclésiaux permet de le préserver. De quoi nous encourager encore, nous Alsaciens-Mosellans, à défendre les avantages du statut concordataire qui contribue mieux que nulle part ailleurs à cette coopération pacifique entre les représentants de l’état et des cultes, pour de belles avancées telles que celles que nous étions réunis pour fêter hier.
A la sortie de la messe, l’ambiance festive était rehaussée par un orchestre de musique écossaise, musiciens en kilt, ce qui n’est pas à proprement parler typique de l’Alsace, mais nous avons la chance d’abriter cette formation musicale dans notre vallée aux mille talents.
Discours officiels, bénédiction du large parvis tout neuf et dévoilement d’une plaque commémorative furent suivis d’une procession en musique et du vin d’honneur offert par la municipalité, dans les locaux de l’école où j’ai enseigné pendant dix-sept années.
Ce fut pour plus d’une vingtaine de bénévoles, dont je faisais partie, l’heure d’enfiler le tablier. Une organisation sans faille en amont par les membres du conseil de fabrique et leurs conjoints respectifs permit que tout se passe au mieux. Il s’agissait de servir à deux cents convives attablés sous chapiteau un repas festif. Tout s’organisa dans l’efficacité, la concorde et la bonne humeur que j’admire très souvent dans mon Alsace d’adoption. Nous étions une demi-douzaine à finaliser “à la chaîne” et dans une cadence soutenue la présentation soignée des assiettes des quatre plats successifs, de l’entrée au dessert. J’ai infiniment admiré l’impressionnante réactivité et le sens de l’organisation des personnes les plus impliquées dans la réussite de cette journée. Rien ne manquait du point de vue logistique, chacun, selon sa propre compétence professionnelle ou associative – agriculteurs-producteurs de laitages maison, responsables de salles des fêtes…- fournissant son matériel et ses denrées les plus adaptés. Entre deux séquences de service, les bénévoles reposaient un peu leurs jambes, dos et bras fatigués pour consommer à leur tour, dans la bonne humeur, l’un ou l’autre des plats servis. Et tous étaient d’autant plus méritoires qu’à quelques exceptions près, l’ensemble se composait de personnes au moins quinquagénaires.
Il était cependant fort gratifiant d’entendre la satisfaction et les remerciements des convives. Tout au long de l’événement, de la préparation des tables sous chapiteau le samedi au rangement et ménage le dimanche soir, les convives partis, je méditais sur cette maxime : “Il y a plus de joie à donner qu’à recevoir”. Cela me semble tout à fait vrai, et d’autant plus que la large équipe de bénévoles était soudée et joyeuse, jusqu’au repas nous réunissant encore le dimanche soir autour des restes abondants.
Cette journée festive, dans mon cher petit village où je vis depuis vingt-sept ans maintenant, me laisse le cœur plein de gratitude. Je pense que le ciel de la météo comme celui de la communion des saints étaient avec nous. Un événement dont chacun se souviendra avec sourire et reconnaissance tant pour la beauté de notre cadre de vie et de notre patrimoine que pour la grande convivialité qu’il a permise, après ces deux années trop pauvres en interactions sociales pour cause de pandémie.
Il faut dire qu’outre toutes ces occasions de rendre grâce, nous avions obtenu, authentifiée par un tableau qui restera dans notre église, la bénédiction apostolique officielle du pape François. Fierté et encouragement pour toutes et tous.
Véronique