Je suis allée sur la montagne, à 700 m d’altitude, pour recevoir pendant deux jours un enseignement biblique. En session organisée par les amitiés judéo-chrétiennes, nous nous sommes plongés dans la Genèse de la fin du chapitre 27 au chapitre 33. Nous avons ainsi médité pendant quelques douze heures, autour d’un bibliste, sur le départ de Jacob vers Harrân, sa rencontre avec Rachel, ses deux mariages et la naissance de ses onze premiers enfants, sa longue mise à disposition de son beau-père Laban puis son retour avec famille et troupeaux au bout de vingt ans vers Canaan, sa réconciliaton avec son frère jumeau Esaü et son arrivée à Sichem.
Vaste histoire de mouvements, de bénédictions, de rencontres amoureuses, de labeur, d’exploitation intra-familiale, de jalousies, d’intrigues pour enfanter, de conciliations impossibles entre le gendre et son beau-père, de fuite, d’accord finalement, de retour vers la terre d’origine, d’improbable réconciliation entre frères ennemis, le tout entrecoupé des moments clés de rencontre de Jacob avec le Dieu de ses pères Isaac et Abraham : son songe au lieu qu’il nommera Béthel assorti de la promesse d’une grande descendance à laquelle Jacob répond par la promesse d’une maison pour son Dieu, et lors du passage de Yabboq, la lutte nocturne pendant laquelle il recevra la bénédiction de Dieu, le nom d’Israël et dont il sortira boiteux de la hanche.
Vaste fresque d’un long fragment de la vie de Jacob, cet homme au demeurant plutôt malchanceux mais cependant béni maintes fois, qui représente l’élection d’un peuple chargé d’incarner à la fois le témoignage au Dieu unique et l’altérité entre le monde idolâtre et les authentiques enfants de Dieu, ceux qui cherchent à demeurer fidèles aux commandements divins, entre chutes, persécutions multiples et retours vers le Père de toute justice et de toute miséricorde.
Nous avons effectué cette étude de quelques chapitres de la Genèse à la fois dans l’esprit du judaïsme rabbinique et dans la mise en parallèle avec le Nouveau Testament, non sans méditer sur les implications de ces passages et de leurs significations multiples dans nos propres vies.
Redescendue de la montagne, je peux faire un premier bilan de mon propre cheminement de ces dernières semaines.
C’est grâce à l’église protestante, que je fréquente depuis la fête de la Pentecôte, que j’ai pu avoir l’information de cette session biblique œcuménique. J’en rends grâce, moi qui ai la Parole de Dieu chevillée au cœur.
Comme Jacob, je suis à un tournant de ma vie dû au fait d’avoir quitté un lieu d’ancrage. Jacob part de la maison de son père à la demande de ses parents Isaac et Rebecca qui craignent pour sa vie, Esaü ayant le désir de se venger sur son frère de la captation de la bénédiction paternelle (Genèse 27).
Pour moi, c’est l’Eglise catholique de mon baptême et de toute ma tradition familiale que je quitte, mais sans la renier pour autant. A cette session, j’étais par moments heureuse d’être en connivence avec des participants catholiques quand, en petits groupes, nous évoquions par exemple des saints qui nous marquent ou des anecdotes de mission.
Mais pour autant, je mesure le gain, en quatre semaines, de mon intégration progressive à ma nouvelle paroisse, luthérienne. Présence plus forte de la Parole, culte au cours desquels je me sens bien et dont je ne sors plus énervée comme après une messe dans ma paroisse de domicile, moments conviviaux des plus chaleureux qui me valent des rencontres avec des personnes croyantes très attachantes, envie déjà de prendre à partir de septembre des engagements dans les œuvres de cette paroisse. Le tout baigné d’un accueil des plus chaleureux, dans la simplicité, le partage, l’écoute et non le prosélytisme. Je me sens redynamisée dans ma foi et ma manière de la vivre et de la célébrer.
Notre bibliste soulignait que les départs, les ruptures dans la Bible sont toujours ouverture à l’inattendu dont peuvent jallir la bénédiction et la lumière. Quelque chose de neuf peut advenir, qui plaise à Dieu et nous comble nous-mêmes. Et présentement, dans ma démarche de départ vers une autre paroisse et une autre manière chrétienne de célébrer la foi et la Parole de Dieu, c’est vraiment ce que je ressens. Et j’en rends grâce.
1 commentaire
Je comprends et respecte votre démarche, et ne cherche pas à faire de prosélytisme pour l’Église catholique. Je dirais la même chose à quelqu’un qui quitte son Église pour l’Église catholique. A moins, dans un cas comme dans l’autre, que ce ne soit motivé par une révélation intérieure. Car je pense qu’on ne quitte pas une Église, on entre dans une Église, parce que nous croyons qu’en elle réside la Vérité – non parce qu’elle a plus decqualités et moins de défauts. Mais ça ne paraît pas être le cas, et je vois difficile qu’il.y en ait une dans ce cas.
J’essaie de m’expliquer: l’Église catholique n’est pas “meilleure” que d’autres Églises ou spiriitualités non religions, comme le bouddhisme, parvexemple; et réciproquement. Elle a sûrement plus de défauts, accumulé plus de fautes, de lourdeurs, d’erreurs que toute autre. Pour moi, la majeure partie du po tificat de JPII, et celui de B XVI, ont été une souffrance continuelle. Je vis au Mexique depuis longtemps, et j’ai été confrontée à des manques de formation et mentalités insupportables. A plusieurs reprises, j’ai passé longtemps sans aller à la messe, ou parfois je m’arrangeais pour arriver après l’homélie, car j’avais mes propres combats et je pensais que je devais d’abord protéger ma santé mentale.
Maus se sentir bien ou mal n’est pas un critère. Se sentir mal.peut être positif, on saitvqu’on vit déjà. Mais aussi, c’est un chemin pour découvrir que dans un malaise ou conflit avec une petsonne, un groupe, une entité, il faut être deux. Il y a aussi en nous des choses qui ne vont pas, et qui font leur part dans le malaise ou le conflit, et si on quitte le lueu du malaise, tôt ou tard, on les retrouvera.
Profondément, la seule réalité qui puisse nous faire être dans une Église, et passer à travers ses failles comme à travers les nôtres, c’est la foi. La foi, dit Jean de la Croix, et c’est aibsi, est un habitus obscur.
C’est cimme jn organe, qui vient de Dieu mais ne peut vivre sans nous, qui nous lance dans une adhésion amoureuse, obscure, dans laquelle Dieu nous nourrit. Ce n’est jamais le fruit de convictions, accords, bonnes raisons.
Et il y a une raison pour laquelle je ne crois pas qu’on puisse “se convertir” à une Église pritestante (si on y est, c’est autre chose), c’est qu’il y a en lui un “moins”- et ce même s’il était infiniment plus parfait, et ce “moins”, c’est quelque chose qui est essentiel au christianisme, qui est l’unité.
Je crois,que Luther et Calvin avaient d’excellentes raisons, mais qu’ils ont eu tort en faisant passer ces raisons au-dessus de l’unité. A chaque fois qu’on fait passer des raisons au-dessus de l’unité, c’est que nous mettons notre jugement au-dessus de l’unité.
A présent, les traditionalistes suivent une pente où ils mettent leurs convictions au-dessus de l’unité.
C’est une démarche, où il entre toujours de l’orgueil, mais le point, c’est que s’ils ne renoncent pas, l’unité va être brisée.
Je pense que le ministère pétrinien doit changer, retrouver le “primus inter pares” et la grande collégialité, mais en lui repose l’unité. Une fois ou l’autre, j’ai entendu des responsables protestants exprimer la même pensée, soit au sujet de l’Écriture, soit sur le plan ecclésial, et dire que, même séparés, ils sont soutenus par cette pierre, c’est le cas de le dire, ce centre de l’unité, même blessée, qu’est l’Église catholique, que sans elke, tout s’effondrerait. C’est aussi le fait d’être cette “pierre” qui la fait si dure à remuer. Mais nous sommes humains, il est difficile de tout concilier.
La seule question, pour vous, pour moi, pour tous, est si le Christ a remis au collège des Apôtres, autour de “Pierre”, le “dépôt”, et si donc en.ce collège, si noir soit-il, se trouve la source, dont finalement, même “séparés”, tous boivent. Parce que c’est indispensable pour tous de retrouver l’unité autour de la source, et je crois que tous en sont conscients.
Et est-ce que le noyau de ma foi est nourri chez “l’autre”?
Cela n’empêche pas de profiter des richesses de tous.
De toute façon, c’est en toute cordialité que je vous dis ça, et avec amour.