“Ajouter foi à la folie”, c’est le titre d’un magnifique livre de Monique Durand-Wood que je viens d’achever de lire (Editions du Cerf, 2009)
Pourquoi ai-je tant tardé à le lire ?
Peut-être était-ce là le bon moment, peut-être fallait-il que ma fille m’offre ce livre à Noël avec amour, peut-être fallait-il que je connaisse déjà un peu Monique avant de le lire.
D’elle, je savais déjà qu’elle est délicate et pleine de foi, d’une foi belle et assumée. Avec elle j’ai tissé le début d’une amitié, ici, mais qui n’était pas complètement équitable encore puisqu’elle m’avait lue et que je ne l’avais pas encore fait.
Voilà. J’ai son beau livre sous les yeux, et j’en sors tout émue.
Un plaidoyer pour la reconnaissance de ce qu’il peut y avoir de transcendant dans la folie, même là, surtout là est-on tenté de dire avec elle en lisant certaines pages.
Monique Durand-Wood a côtoyé de près la folie en étant aumônier d’hôpital psychiatrique. Elle est entrée là avec humilité et délicatesse, tandis que ceux qui ont basculé un jour dans le chaos intérieur y entrent souvent avec pertes et fracas, se heurtant avec violence à un monde qui ne semble pas leur vouloir que du bien.
Monique raconte ses rencontres improbables, celles qu’on ne fait que là, et dans chacun de ses personnages, je retrouve une détresse, une béance, un élan brisé, une terreur de vivre que j’ai pu éprouver moi-même il y a plus de dix ans et rencontrer dans les yeux de mes compagnes et compagnons d’infortune, ceux qui étaient là pour rester le soir tandis que Monique partait comme sur la pointe de pieds. “Nos frères et soeurs fous hospitalisés traversent des nuits terribles, avec ce sentiment angoissant que leur identité se perd.” (p 200-201) Oui. Elle a compris ce qui se joue en nous. Elle a compris aussi que derrière ce que la société appelle “délire” pour ne plus avoir à s’en occuper et oublier le fou derrière la porte verrouillée du pavillon, il y a une capacité d’évangile. Une soif de transcendance. Une recherche de réponse à des questions sans fin auxquelles le monde ne peut pas répondre.
Monique a persévéré dans sa fonction d’aumônier, et bien souvent, elle a touché à la quintessence de l’être qu’elle avait en face d’elle, là où il n’y a plus de fard, là où l’instant d’une rencontre, quand il n’y a pas l’autorité quelque peu menaçante d’une blouse blanche, on peut recueillir la bouleversante confidence d’une vie.
J’ai été une patiente d’hôpital psychiatrique. J’ai eu la chance d’y rencontrer un aumônier prêtre qui m’a réconciliée avec l’Eglise et m’a pacifiée.
Mais si cet aumônier avait été Monique, j’aurais été heureuse aussi de goûter sa présence, son écoute délicate, son regard sans jugement.
J’aurais moi aussi serré contre mon coeur l’évangile qu’elle m’aurait tendu.
J’aurais aimé qu’enfin, on ajoute foi à ma folie…
Merci, Monique, pour cette plongée au coeur d’un univers qu’on a bien tort de ne pas vouloir connaître. Il est là, à portée de livre…
http://www.editionsducerf.fr/html/fiche/fichelivre.asp?n_liv_cerf=8613
2 commentaires
J ‘ai lu avec grand intéret. Merci pour ton témoignage. C’est fort, on sent la sincérité et c’est profond.
ça m’a fait du bien et je ressens beaucoup de choses similaires. Une vie intérieure riche et de la frustration.
Bon temps à toi!
Merci beaucoup hennebo, cela me touche ! 🙂