J’ai un rapport assez ambigu au football. Je trouve qu’il occupe une place bien trop grande sur la scène médiatique, et qu’il éclipse injustement la plupart des autres sports, quand ce n’est pas l’actualité tout entière. Je suis aussi scandalisée par les salaires des joueurs professionnels des grands clubs, ce sont certes des sportifs de haut niveau, mais rien ne justifie qu’ils se trouvent propulsés au sommet de la hiérarchie salariale dans notre société. Rendent-ils un si grand service au monde et à la personne ? Conséquence de ce fait, un certain nombre de jeunes garçons rêvent de telles carrières très lucratives plutôt que d’un travail honnête qui permette de gagner sa vie tout en étant utile à la société. Les brassages d’argent des clubs de football me choquent profondément.
Je trouve aussi démesurée l’idéalisation d’un club, d’une équipe, d’un joueur par ses supporters. Quand affleurent l’idolâtrie et l’engouement frénétique, les superlatifs exagérés, les manifestations de mauvaise foi voire d’agressivité à l’égard des adversaires, je suis fort mal à l’aise et j’ai bien souvent envie de me tenir résolument à l’écart de ce sport.
Mais régulièrement, pour les grands rendez-vous que sont par exemple la Coupe du monde, je me laisse prendre au jeu. Je me surprends à vibrer pour notre équipe nationale, à admirer l’engagement physique des joueurs, à espérer le temps d’un match pour les équipes des pays plus pauvres parvenues par le biais de cette compétition dans la “cour des grands”.
J’aurais pu suivre les détracteurs de cette Coupe du monde qui se tient à coté des favellas et qui a généré des scandales sociaux incontestables. Mais à voir l’enthousiasme du pape François pour le football, je me suis dit qu’après tout, on avait le droit, à son exemple, de se laisser un peu prendre par l’enchantement de ce sport spectaculaire.
Et me voilà, depuis le début de la compétition, à suivre les succès de nos “bleus”, à admirer aussi le professionnalisme de ces joueurs du monde entier qui donnent tout, l’espace de deux heures, pour défendre leur nation, je me laisse emporter par le suspense parfois oppressant des rencontres, je souris quand des voitures parcourent les rues en klaxonnant, dans l’élan d’enthousiasme des victoires…
J’aime le visage de la France “black – blanc – beur ” que donne notre équipe nationale et qui nous avait déjà enchantés en 1998. Cette Marseillaise qui a du goût parce qu’à ce moment-là, elle fédère. L’oubli pour un moment des laideurs de certains discours électoraux . La joie partagée avec tous ceux que l’événement intéresse. Un frémissement d’enthousiasme et de fierté dans notre pays si morose il y a peu.
Alors voilà, j’ai envie aujourd’hui d’y aller de mon petit : “Allez les bleus !” Et que les meilleurs gagnent !
2 commentaires
Voilà qui résume bien l’attrait ambigu des grandes compétitions sportives et du foot en particulier : je suis d’accord avec toi, et François-Marie le dit bien aussi : malgré tout ce que tu dis, l’argent etc, on a envie, et besoin de rêver, de s’enthousiasmer collectivement : cela réunit, fédère, galvanise ! Et tout ça sans guerre, juste pour le sport, le jeu. Les grandes fêtes populaires ont quelque chose d’émouvant, qui nous transcende…
Et cette année, moi aussi je me prends au jeu du foot, avec cette belle équipe des bleus ! Et avec les autres aussi d’ailleurs. Dommage que la télé française ne diffuse que les matchs des bleus ou presque, c’est frustrant de ne pouvoir suivre les autres matchs !
Tous les sportifs, même ceux des petits clubs, même ceux des sports inconnus, ont une utilité publique fondamentale : ils font rêver ! C’est la même chose pour les artistes. Et pouvoir rêver, ça n’a pas de prix !
Quant au niveau de leur salaire, ce n’est que l’application stricte et keynésienne de la loi de l’offre et de la demande…
Merci pour ce billet qui fait rêver lui aussi, un peu !