Je l’ai lue un peu à la hâte, comme si c’était urgent, entre plage et terrasse ensoleillée. Dans de beaux décors, préservés. Dans la proximité de ma famille, de mes amis. Dans ce moment si particulier de l’été où je me ressource en moi-même, en harmonie avec la nature environnante.
J’ai lu, et j’ai aimé. J’ai été très impressionnée par la densité informative des premiers chapitres. Enfin un constat sans concession de l’état de notre “maison commune”, dans un regard non pas politique mais réaliste autant sur le plan environnemental qu’humain. Avec cette dimension spirituelle qui manque tant, bien souvent, à ceux qui se préoccupent d’écologie.
J’ai aimé le souci permanent des pauvres, ceux d’aujourd’hui, ceux de demain. Ceux qui sont broyés par le système économique et bancaire qui a cours au niveau mondial. Je retiens en particulier :
95.L’environnement est un bien collectif, patrimoine de toute l’humanité, sous la responsabilité de tous. Celui qui s’approprie quelque chose, c’est seulement pour l’administrer pour le bien de tous. Si nous ne le faisons pas, nous chargeons notre conscience du poids de nier l’existence des autres. Pour cette raison, les Évêques de Nouvelle Zélande se sont demandés ce que le commandement « tu ne tueras pas » signifie quand « vingt pour cent de la population mondiale consomment les ressources de telle manière qu’ils volent aux nations pauvres, et aux futures générations, ce dont elles ont besoin pour survivre ».[78] [Fin de citation]
Je me souviens de discussions âpres avec un membre de ma famille, chef d’entreprise, qui ne parle que profit, marges et nécessités du marché. Quand on évoque les pauvres avec lui, chez nous ou ailleurs, il balaie tout d’un revers de la main : nous sommes des illuminés, inconscients des nécessités économiques contemporaines. Et les autres n’ont qu’à travailler pour vivre…
Tout le monde n’ose pas ce discours décomplexé de parvenu, mais je me réjouis que le Pape François donne avec cette encyclique un grand coup de pied dans la fourmilière, avec tact et méthode.
Je retiens aussi :
90. Cela ne signifie pas que tous les êtres vivants sont égaux ni ne retire à l’être humain sa valeur particulière, qui entraîne en même temps une terrible responsabilité. Cela ne suppose pas non plus une divinisation de la terre qui nous priverait de l’appel à collaborer avec elle et à protéger sa fragilité. Ces conceptions finiraient par créer de nouveaux déséquilibres pour échapper à la réalité qui nous interpelle.[64] Parfois on observe une obsession pour nier toute prééminence à la personne humaine, et il se mène une lutte en faveur d’autres espèces que nous n’engageons pas pour défendre l’égale dignité entre les êtres humains. Il est vrai que nous devons nous préoccuper que d’autres êtres vivants ne soient pas traités de manière irresponsable. Mais les énormes inégalités qui existent entre nous devraient nous exaspérer particulièrement, parce que nous continuons à tolérer que les uns se considèrent plus dignes que les autres. Nous ne nous rendons plus compte que certains croupissent dans une misère dégradante, sans réelle possibilité d’en sortir, alors que d’autres ne savent même pas quoi faire de ce qu’ils possèdent, font étalage avec vanité d’une soi-disant supériorité, et laissent derrière eux un niveau de gaspillage qu’il serait impossible de généraliser sans anéantir la planète. Nous continuons à admettre en pratique que les uns se sentent plus humains que les autres, comme s’ils étaient nés avec de plus grands droits. [Fin de citation]
Que ne lit-on pas, sur les réseaux sociaux, d’indignation pour un chien abandonné, tandis que les embarcations pleines de migrants qui s’échouent en Méditerranée rencontrent un silence gêné !
Bien sûr, je ne me prétends pas meilleure que les autres à ce niveau, je confesse ne concevoir ni ne proposer de solution à cette tragédie humaine qui défigure notre société bien-pensante.
En ne lisant que les premiers chapitres de Laudato si’, on pourrait en rester au désespoir de ce que l’homme a fait du monde qui lui a été confié. Mais je relève avec joie que le Pape valorise les petits efforts du quotidien, qui pourraient sembler ridicules noyés dans cette masse de maltraitance à la “maison commune”. Terminons donc sur ce passage :
212. Il ne faut pas penser que ces efforts ne vont pas changer le monde. Ces actions répandent dans la société un bien qui produit toujours des fruits au-delà de ce que l’on peut constater, parce qu’elles suscitent sur cette terre un bien qui tend à se répandre toujours, parfois de façon invisible. En outre, le développement de ces comportements nous redonne le sentiment de notre propre dignité, il nous porte à une plus grande profondeur de vie, il nous permet de faire l’expérience du fait qu’il vaut la peine de passer en ce monde.
Source des citations : http://www.eglise.catholique.fr/vatican/les-ecrits/395463-encyclique-laudato-si/