Au départ, il y a un roman lu en classe. Une chatte blanche qui va avoir des petits s’invite dans le récit. Alors mon sujet d’expression écrite m’a semblé couler de source :
“Décris un animal que tu connais et raconte ton histoire avec lui.”
Réactions plutôt enthousiastes, petits débats pour savoir de quel animal on va parler. Ils recopient la consigne puis écrivent consciencieusement, pendant que je m’occupe des plus jeunes.
Puis je remarque qu’un enfant n’écrit rien, il est prostré devant sa feuille et des larmes coulent sur ses joues.
“Mais comment je fais ? Ils sont tous morts, mes animaux !”
Consternation. Trouver les mots pour consoler, se dire un moment qu’on a peut-être mal choisi le sujet. Il ne veut pas parler d’un animal, il n’en connaît plus aucun me dit-il. Il est resté longtemps sans écrire, alors je lui propose de raconter tout à fait autre chose, tiens, quelle est son activité ? Il retrouve un peu le sourire, d’accord, il parlera du judo.
En faisant le tour de la classe, un autre garçon, un peu plus grand, en panne lui aussi.
“Tu ne veux pas parler d’un poney par exemple, puisque tu en fais ?”
Nouveaux pleurs, nourris.
“Si, je voulais, mais elle a été piquée.”
Je me mords de plus en plus les lèvres. Mais il est plus grand, et je sens là un gros chagrin qui n’a pas été assumé.
“Tu es sûr que tu ne veux pas parler d’elle quand même ? Ça serait un bel hommage, et tu irais mieux après.”
Il a noirci plus d’une grande page, avec pas mal de fautes d’orthographe, mais son texte était très beau, très touchant. Et à la fin, de grands cœurs pour sa petite compagne d’équitation qui lui manque tant.
S’il a pu comprendre que l’écriture pouvait être aussi une thérapie, cette matinée n’aura pas été tout à fait perdue…