Je crois que je peux me réjouir, depuis plusieurs années, de n’avoir aucun ennemi, ni quotidien, ni occasionnel. Cela procure une douce paix intérieure et rend la vie bien plus agréable. Ne pas avoir à récriminer sans cesse contre untel ou unetelle, ne pas subir ses assauts.
Par contre, et cela s’avère ces derniers jours, j’ai un adversaire. Un redoutable adversaire. Nous nous affrontons sur un forum catholique avec des vues totalement opposées. Il croit en tout ce que je ne crois pas et en fait la promotion, je pense ne pas me tromper en disant qu’il a voué la deuxième moitié de sa vie aux causes qu’il défend sans cesse dans ses livres et dans ses échanges musclés avec ses contradicteurs. C’est un promoteur acharné des écrits de Maria Valtorta et des “apparitions” de Medjugorje.
Sur Medjugorje, je me suis déjà souvent exprimée sur ce blog et quelques forums : je ne crois pas un seul instant que la douce Vierge Marie apparaisse là-bas. Que les “voyants” aient des visions paranormales, je veux bien le croire. Mais que cette “gospa” fade, bavarde et entraîneuse de foules depuis 35 ans soit la Mère du Christ, non, à aucun moment je ne peux le croire. Le ferment de division ecclésiale qui est semé là-bas parle de lui-même : les origines n’en sont pas célestes. Et gardons-nous de croire que ces “apparitions” soient inoffensives : elles ont réussi à induire toute une vision erronée de Marie dans une frange non négligeable de l’Eglise.
Tout aussi erronée est la conception de l’Evangile de Maria Valorta.
Je n’ai pas perdu mon temps à lire les plus de 4000 pages de son œuvre : “L’Evangile tel qu’il m’a été révélé”. Je préfère me nourrir d’écrits spirituels autrement édifiants. Mais nous devons à mon adversaire d’avoir vulgarisé cette œuvre sur le net : j’en ai lu un certain nombre d’extraits clés, qui nous présentent un Jésus insupportable de suffisance et de leçons de morale. Bavard à l’excès, sa parole si efficace dans les évangiles canoniques finit par être déformée en un prêchi-prêcha tout à fait indigne de son humanité divine. Sans compter une fusion quasi incestuelle avec sa mère, elle si discrète dans la Bible et si respectueuse de l’autonomie de son Fils dans ses années de prédication. Marie, que j’aime infiniment, y est méconnaissable de moralisme et d’omniprésence. Quant à ma chère Marie de Béthanie – qui m’est chère parce chère au Christ dans sa pureté, son écoute et sa fidélité – bien sûr, Maria Valtorta l’affuble de tout un passé de prostituée et la confond allègrement avec Marie de Magdala et encore avec la prostituée repentie et non nommée des Evangiles.
Je sais que beaucoup d’hommes d’Eglise ont été séduits par cette œuvre – séduits est bien le mot. Ce qui ne vient pas de Dieu est souvent bien plus séducteur que ce qui en vient. La Parole de Dieu est “coupante comme une épée à deux tranchants” (Hébreux 4, 12) : elle fait mal là où elle passe. Les sucreries de Maria Valtorta endorment les consciences, et ne nous leurrons pas : ceux qui s’éprennent de la “Vierge Marie” de son oœuvre ont trouvé un argument de choix pour mépriser sournoisement la plupart des autres femmes. La mariolâtrie est souvent la façon la plus élégante d’être misogyne. Ainsi, mon adversaire, quand je le conteste sur des points d’incohérence à Medjugorje ou dans Maria Valtorta, me répond-il par des attaques méprisantes sur ma personne et non sur mes inspirations.
Si j’ai choisi de rédiger ce billet ici aujourd’hui, c’est que dans le contexte de ce forum catholique, mon adversaire bénéficie de la protection tacite ou déclarée des modérateurs. Et un débat sérieux y est souvent noyé dans les protestations de ceux qui ne croient pas en la puissance d’intercession de Marie, donc finissant toujours de la même façon, dans des querelles de mots.
Je sais que je ne peux pas rivaliser avec mon adversaire sur le plan de l’érudition. Je l’ai dit, il est redoutable, et a tôt fait de nous écraser de sa culture orgueilleuse. Sans compter qu’il s’octroie lui-même l’infaillibilité en multipliant les références à des textes d’hommes d’Eglise parfois éminents, mais peut-être malheureusement séduits par le faux qui paraît plus convaincant que le vrai.
Je ne prendrai pas mon adversaire en traître. Je lui partagerai honnêtement ce billet.
Il pourra bien répondre avec son tissu d’argumentation et de citations catéchétiques. De mon côté, je ne compte que sur la grâce de l’Esprit Saint, qui finira bien par justifier ce qui doit l’être et discréditer ce qui émane de l’unique Adversaire.
4 commentaires
Dans la mesure où les écrits de Maria Valtorta ont été condamnés par l’Eglise en 1949, 1959, 1960, 1961, 1985 et deux fois en 1993, il me semble évident qu’on ne saurait les prendre comme parole d’Evangile, surtout quand la condamnation de 1985 émane directement de Mgr Razinger, qui deviendra Benoit XVI. Il faut vraiment n’avoir pas le moindre respect ni la moindre obéissance envers l’Eglise pour continuer, aujourd’hui, à prendre le contre-pied de ces condamnations multiples, unanimes et jamais démenties de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi… (source https://fr.wikipedia.org/wiki/Maria_Valtorta )
Merci El Padre, vous me réconfortez ! Les défenseurs de Maria Valtorta m’opposent toujours que c’était le livre de chevet d’un pape !
Oui, ceux de Medjugorje prétendent toujours aussi que les papes auraient voulu y aller mais n’ont pas pu. Ce sont des affirmations qui ne coûtent rien mais dont l’authenticité est hautement improbable, parce qu’avec la liberté de parole qu’ont eu tous les papes de ces dernières décennies, ils ne se seraient pas gênés pour le dire eux-mêmes si ça avait été vrai, voire pour y aller carrément. Règne n°1 de l’honnêteté intellectuelle : toujours vérifier ses sources, et dans ce cas précis ne croire des papes que ce qu’ils disent eux-mêmes et qui est publié par des organes de presse dignes de confiance (l’osservatore romano, le site du vatican, etc…), et non pas ce qu’en dit “l’homme qu’à vu l’homme qu’à vu l’ours”. 😉
Bien d’accord avec vous ! 🙂