Contrairement à ce que l’on pourrait penser ici, je vis plutôt entourée de personnes qui sont non-croyantes voire farouchement athées ou alors de ceux que je pourrais appeler des “chrétiens mous” : baptisés, ils ne pratiquent que pour les fêtes de famille ou les enterrements, et d’ailleurs il est toujours assez stupéfiant pour moi de les voir communier en ces circonstances sans que jamais ils n’accomplissent la démarche du sacrement de la réconciliation… Mais cela est un autre débat.
L’Evangile, ces “chrétiens mous” s’en accommodent tant bien que mal : ils en gardent quelques valeurs clés, celles qui ne sont pas trop exigeantes, mais les paroles percutantes du Christ en matière de pardon, de pauvreté, de fidélité, de prière sont bien souvent mises à l’écart quand elles empêchent un peu trop de vivre insouciants…
Plus nombreux encore sont dans mon entourage les athées ou les indifférents. Je m’entends très bien avec eux, mais ils sentent en moi une part de mystère qui les laisse de marbre ou qu’ils évacuent autant que possible des conversations. C’est assez étrange. Depuis le temps, je m’y suis habituée, mais c’est parfois un peu douloureux que le moteur de ma vie soit considéré par ceux que j’aime et qui m’aiment comme une gentille illusion, une auto-énergie priée de rester confinée dans ma sphère intime, ou pire, un irréductible délire dont il faut bien s’accommoder.
Alors voilà, parfois, j’ai envie quand même de pouvoir parler de ma foi avec des personnes qui y entendent vraiment quelque chose. C’est la raison de mes nombreuses correspondances avec des hommes d’Eglise. C’est aussi la raison pour laquelle j’ai cherché à tout prix ces dernières années à renouer avec une amie perdue de vue dont je savais la foi très vive.
Nous nous sommes retrouvées aujourd’hui, et quel grand bonheur ! Son dernier né, je l’ai tenu nourrisson dans mes bras la dernière fois que nous nous étions vues, et aujourd’hui, je me suis retrouvée face à un beau grand jeune homme de presque 17 ans…
Le temps a été aboli ces quelques heures que nous avons passées ensemble. Les tempêtes de la vie de couple nous ont toutes deux laminées – et quelle surprise pour moi de l’apprendre à son sujet !- mais les années passant, la sérénité et la confiance inébranlable en notre Dieu l’ont emporté. Son sourire est doux, son langage est paisible, la paix et la joie qui se dégagent d’elles sont bienfaisantes, comme alors ; elle est plus grave peut-être mais plus libre aussi, son rire tinte comme dans mes souvenirs, et je vois défiler dans son nouvel intérieur ses enfants tous plus aimables et ouverts les uns que les autres. Presque deux décennies, et nous nous retrouvons, mères comblées, femmes aguerries mais non aigries.
J’ai aimé notre conversation, notre connivence en parlant de notre amour pour le Christ et de nos engagements respectifs en Eglise et dans le monde. Ce que mes amis non-croyants ou “chrétiens mous” ne peuvent comprendre, elle l’a discerné en quelques échanges ce matin et l’a accueilli avec joie. Et j’ai aimé l’entendre, à tout propos, prononcer un discret “Merci Seigneur !”
Oui, merci Seigneur, pour tous mes amis, mais aujourd’hui en particulier pour cette amie-là, qui T’aime comme je T’aime ! Que la vie ne nous sépare plus !