Nous méditons aujourd’hui Marc 6, 14-29, cet extrait d’évangile qui décrit la succession d’événements qui ont conduit Hérode à faire décapiter Jean le Baptiste.
Comme je l’ai souligné un jour, c’est, dans tout l’Evangile, le seul passage où une femme joue un rôle trouble. Le seul. Et Jésus n’est pas présent à la scène…
L’iconographie chrétienne s’est emparée de cette scène, le cinéma et le monde du spectacle aussi, et les réalisateurs s’en donnent en général à cœur joie en représentant une jeune Salomé dansant de façon totalement lascive. J’ai été fort choquée par exemple il y a quelques années par cette séquence donnée sur le parvis de Lourdes par la compagnie de Robert Hossein – que j’apprécie habituellement beaucoup – dans le spectacle “Une femme nommée Marie”. La danse provocante de Salomé y était interminable.
L’évangile en dit-il autant ? Pas du tout ! La jeune Salomé danse, sans doute est-elle belle et sa danse réussie ; que des hommes âgés la regardent avec des yeux lubriques est une toute autre affaire. C’est avant tout leur propre problème de regard qui est ici en jeu. Hérode est déjà adultère, qu’il franchisse le pas d’un désir incestuel ne nous étonnera donc pas. Hérodiade est bien sûr moins innocente dans l’affaire et elle manipule sa fille contre Jean le Baptiste, sachant bien que son compagnon Hérode, dans son orgueil, ne se dédira pas de sa promesse devant ses invités.
Cette scène a contribué encore et encore à la misogynie véhiculée par l’Eglise. Il conviendrait cependant de relativiser les choses : dans tout l’Evangile, Hérodiade est la seule femme à jouer un rôle négatif. La seule ! Alors qu’il y a une infinité de comploteurs contre Jésus qui sont tous des hommes, exclusivement. Voilà, je tenais à dire cela.
Pourquoi ce sujet me tient-il à cœur ? Peut-être parce que mes filles sont belles, et dansent, l’une est même étudiante en formation professionnelle de danseuse. Jamais, jamais mes filles ne dansent de façon provocante. Elles dansent magnifiquement, à l’aise dans leurs corps souples qui leur permettent ces prouesses. Quand j’ai l’occasion de les voir sur scène, j’en pleurerais de joie. Elles donnent du bonheur aux yeux et au cœur. Et si des spectateurs lubriques y voient autre chose que du talent et du travail, c’est leur problème et non celui de mes filles. Elles dansent leur liberté de femmes et la beauté de l’art.