Je suis ce qu’on appelle une catholique pratiquante, mais j’avoue que mon appartenance à cette Eglise à laquelle j’ai choisi de demeurer fidèle me pèse plus d’une fois. Je pourrais même dire, ces derniers temps, de plus en plus.
Tout d’abord, je me sens à l’étroit dans le dogme catholique. Le Catéchisme de l’Eglise catholique semble avoir réponse à tout, tout expliquer, régenter toute notre vie. Or ma foi est beaucoup plus large, plus vaste que ces réponses toutes faites à chaque question que nous risquerions de nous poser. Le dogme pèse sur tout catholique comme une chape de plomb. Le contester, c’est déjà avoir un pied dans l’hérésie, qui nous rend passible d’excommunication. Contester le dogme, c’est faire fi de la tradition de l’Eglise et de l’infaillibilité pontificale. C’est encourir l’accusation de péché d’orgueil. Or certains pans du dogme m’apparaissent comme éminemment contestables. Mais étant femme, je n’ai jamais eu et je n’ai toujours pas voix au chapitre. La doctrine catholique a été élaborée depuis les origines de l’Eglise exclusivement par des hommes. Pour se donner bonne conscience, elle proclame de temps en temps une femme docteur de l’Eglise… mais longtemps après sa mort, quand ses dires et ses écrits ont été triés et qu’elle n’est plus trop menaçante pour l’ordre établi…
Autre chose me blesse profondément. On parle de l’Eglise sainte et irréprochable. Mais qui est l’Eglise ? Une institution vide de baptisés et de clercs ? Car il faudrait s’entendre. Il y a quelques années, pour apaiser mes maux d’Eglise, on me disait : “Oui, l’Eglise est sainte, mais pas ceux qui la font”.
Or voilà, il ne se passe pas une semaine sans un nouveau scandale ecclésial. Le drame absolu de la pédophilie de certains prêtres a jeté l’opprobre sur tous les catholiques. On voudrait croire que ce cauchemar est fini. Mais non, on allume le journal télévisé et encore une affaire qui éclate. On parcourt les réseaux sociaux et encore une mise en examen d’un soit-disant “spécialiste” des questions familiales en haut lieu ecclésial qui aurait abusé de ses patients en thérapie. J’avoue que pour moi, la coupe est pleine. Non, je ne me sens pas solidaire de ces abuseurs voire violeurs ecclésiaux. Pas plus que je ne me sens solidaire des violeurs de femmes dans les colonnes des journaux. Le viol est à mon sens le péché de l’extrême, le mal absolu avant le meurtre. Et non, je n’ai pas à me sentir solidaire d’un tel crime, moi qui suis femme et innocente de tout abus sur un enfant ou un semblable.
Enfin, le buzz de ces derniers jours a concerné le choix d’un prêtre d’une vie amoureuse plutôt que du sacerdoce, et dans une lettre fort maladroite, il s’en justifie comme d’un nouvel appel de Dieu. J’ai lu beaucoup de billets de blog et de commentaires à ce sujet, je constate simplement que c’était un prêtre vedette promouvant les messes pop-rock, ce qui n’est vraiment pas ma tasse de thé, et que contrairement à la discrétion habituellement recommandée en pareil cas, on fait là tout un tapage et on continue à le considérer comme un héros, alors qu’il ne fait rien moins que trahir une promesse de fidélité absolue au Christ. J’ai déjà dit ailleurs comment et pourquoi j’étais attachée au célibat des prêtres. Je ne vais pas y revenir. Simplement exprimer mon grand malaise, quand tout est ainsi galvaudé, que ceux dont on attend l’exemple de la vie évangélique donnent publiquement des contre-témoignages qui font la une des journaux et discréditent de plus en plus notre Eglise.
Je suis catholique pratiquante, je sais que je ne trouverai dans aucune autre église les sacrements auxquels je tiens, mais je me sens profondément blessée, mal à l’aise, à l’étroit dans cette Eglise à laquelle je dois pourtant fidélité par mon baptême.
3 commentaires
Bonjour gherardi et Claire.
Qu’y-t-il de particulièrement complexe dans mon point de vue ?
Claire, merci pour vos mots. J’aime comme vous dites : “je la vois aujourd’hui imparfaite, bancale, manquer de masculinité parmi les fidèles à la base et de féminité avec toute l’ intuition et le courage dont les femmes sont capables au sommet ..” Oui, c’est très bien exprimé. Mes lecteurs savent que je ne suis pas favorable à l’accession des femmes à la prêtrise, mais il faudrait rompre avec cette exclusion des “non-clercs” dans les grandes décisions ecclésiales qui engagent ensuite tous les catholiques. Il y a là un vrai problème de fond, que Lucetta Scaraffia exprime très bien dans son livre “Du dernier rang, les femmes et l’Eglise”.
Pour ma part, je n’ai jamais pu avoir une admiration sans bornes pour l’Eglise, dès le départ il y avait beaucoup trop de contre-témoignages dans ma famille… Il n’empêche qu’à 53 ans, je suis toujours là, et que j’aimerais maintenant être un peu entendue.
Oui Véronique, moi aussi je suis souvent consternée et très en colère devant les abominations ( en particulier la pédophilie de certains clercs), les lâchetés, les indifférences, les raideurs, les fermetures..L’Eglise est défigurée par le péché de ses membres, par le mien aussi..C’est pourquoi le temps pénitentiel du début de la messe est si important. Malgré tout cela, je sais qu’elle est vecteur de vie pour moi, et à chaque fois que je lis la Parole qu’ elle m’a transmise, et à chaque fois que je vis un sacrement qui passe par elle.. J’ ai rencontré beaucoup de prêtres formidables qui m’ont rapprochée du Christ..J’ ai reçu une multitude de frères et soeurs en Eglise..
Et cette Église, avec un grand E, pour laquelle il y a quelques temps encore j’ avais une admiration sans faille, admiration probablement un peu puérile (ou amoureuse) et donc aveugle, je la vois aujourd’hui imparfaite, bancale, manquer de masculinité parmi les fidèles à la base et de féminité avec toute l’ intuition et le courage dont les femmes sont capables au sommet ..
Cette Église me précède et m’accompagne, malgré tout, dans la foi et l’ Espérance…Elle m’a fait naître… Elle me donne la vie de Dieu…et c’est en premier pour cela que je lui suis reconnaissante! Bonne soirée
C’est complexe Véronique.. Votre point de vue…..