Je ne m’exprime pas ici en journaliste – que je ne suis pas – ou en experte de l’étude des phénomènes ecclésiaux.
Je parle en tant que catholique pratiquante profondément croyante et très à l’écoute de ce qui se dit, se vit ou s’écrit ici ou là. Depuis des décennies, j’observe et je médite sur ce qui se passe en Eglise, dans ma communauté de paroisses et au-delà. J’ai participé à de nombreux forums internet chrétiens, catholiques la plupart du temps, et j’y ai en général été mal accueillie car ma parole dénote et dérange. J’en parle au passé car j’ai renoncé à m’exprimer plus longtemps dans ces lieux-là. Trop d’agressivité et de mauvaise foi.
Aujourd’hui, ce billet et son titre me tiennent à cœur. Je discerne réellement dans l’Eglise catholique actuelle – au moins dans la francophonie – un très profond clivage qui ne correspond pas forcément aux données habituelles sur ce thème.
Depuis bien des années, je m’exprime au sujet des prétendues apparitions de Medjugorje. Certains peuvent y voir une obsession ou une lubie sur un sujet de moindre importance. Qu’on se détrompe. La fracture ecclésiale passe par là, que l’on se préoccupe ou pas de Medjugorje. Elle est révélatrice d’une conception de la foi catholique, et de sa presque opposée.
Je me suis beaucoup frottée aux fanatiques des ces “apparitions” et j’ai pu mesurer toute l’ampleur de leur déformation spirituelle. Et sans que d’autres en soient forcément fanatiques, dès qu’il y a sympathie, attirance, complaisance pour Medjugorje, les caractéristiques des “super catholiques” sont présentes.
Cette Eglise-là se veut l’Eglise des purs. Ceux qui prient des heures le chapelet, qui se confessent une fois par mois – et à Medjugorje, c’est censé être le must ! – qui jeûnent deux fois par semaine, qui vénèrent la Vierge Marie jusqu’à lui mettre une majuscule quand ils parlent d’ “Elle”, qui parlent sans arrêt du diable censé être dans le camp adverse, qui font la course aux apparitions et aux révélations privées, même douteuses, qui se targuent d’adorer comme personne le Saint Sacrement, qui cherchent à respecter à la lettre tous les points de morale familiale du catéchisme catholique : il faut être marié religieusement, surtout ne jamais divorcer – quelle horreur ! – ou alors aimer et attendre son conjoint parti jusqu’à son dernier souffle, honnir l’union libre et prier des larmes de sang pour ses enfants s’ils s’y adonnent. Il faut aussi prier pour les terroristes, pardonner d’emblée et du fond du cœur à l’assassin / violeur de son propre enfant, bénir en prière tous ces pauvres égarés qui ne croient pas aux messages de la Gospa qu’on mettrait presque au-dessus des saintes Ecritures.
Mon portrait est féroce, mais assez fidèle je pense.
Je me permets ce billet aujourd’hui car les dernières paroles du Pape François revenant de Fatima, dans l’avion, me redonnent quelque espoir dans la décision vaticane que j’appelle de mes vœux depuis des années. Le Pape nous le dit clairement, de son ressenti personnel : celle qui délivre message sur message depuis plus de trois décennies à Medjugorje “n’est pas la mère de Jésus”.
Je le crois, je le dis, je l’écris aussi depuis des années. Et je constate encore ces derniers jours le déni, même face à l’évidence, des idolâtres de Medjugorje. Ils remettent volontiers en cause le pape François – mais pas leur très chère Gospa.
Il y a là une profonde fracture, peut-être schismatique, en germe. Quand on a mis presque toute sa foi dans une chimère, on n’est pas prêt à se remettre en question.
1 commentaire
Je partage votre espoir, Véronique, de voir enfin cette question tranchée par notre pape. Ses déclarations du 13 mai au retour de Fatima ne lui laissent plus guère le choix, même si elles n’exprimaient qu’un “avis personnel” . Comment imaginer en effet que le futur avis officiel contredise l’avis personnel ? Peut-être y aura-t-il quelque concession mineure sur les quelques premières apparitions ( qui ne durèrent que quelques jours) et sur lesquelles on devra encore enquêter, mais pour tout le reste ( près de 36 ans) , le doute ne sera plus permis : rien à voir avec la mère de Jésus qui ne saurait être confondue avec une chef de bureau des PTT (expression déjà employée il y a à peu près deux ans).
Il se pourrait que le jubilé de Fatima soit le moment idéal pour distinguer enfin le vrai du faux. Puisse-t-il en être ainsi.