Notre histoire d’amitié commence par un grand malentendu. C’était il y a quelques années, dans les débuts de ce site. Je reçois un message par le formulaire de contact, et celui-ci déclenche immédiatement ma méfiance. Un soi-disant prêtre, ancien Père Blanc au Burkina Faso, me dit être tellement enthousiasmé par mon témoignage “Histoire d’une foi” qu’il me demande mon adresse postale pour m’envoyer son propre livre, recueil de souvenirs et d’expériences de sa mission en Afrique. Ça respire tellement l’arnaque que dans un premier temps, je ne réponds pas. Nouveau message, dans le même style un peu abrupt. Je réponds à cette personne que je ne crois pas un mot de ce qu’elle m’écrit et qu’elle doit cesser de m’importuner.
Et puis je me mets en tête de prévenir ce prêtre, qui existe, je l’ai vérifié et j’ai trouvé ses coordonnées sur le net, que quelqu’un cherche à usurper son identité pour m’extorquer mon adresse postale.
Quelle n’est pas ma surprise quand ce Père Blanc, désormais retraité en France, me répond que c’est bien lui qui m’écrit et qu’il aurait dû se douter que j’allais être méfiante, qu’il reconnaît que j’ai bien fait d’être prudente !
De là part une amitié épistolaire de plusieurs années. Il m’envoie son recueil – passionnant – et nous nous écrivons pour les grandes et petites occasions. Je reçois son message de Nouvel An adressé à ses proches et à ses amis, je lui adresse mes vœux pour les fêtes liturgiques, je me confie aussi à lui sur ma vie spirituelle et récemment, il me conseille fort judicieusement sur un texte que je lui donne à lire. En bon pasteur, il me retient de toutes ses forces quand j’ai des velléités de prendre mes distances avec l’Eglise. Je suis toujours d’autant plus admirative qu’il a près de 85 ans, un cancer qui le ronge depuis des années et pour lequel il a subi maintes interventions chirurgicales, et qu’il prend la peine de m’écrire, parfois de façon manuscrite, toujours plein de sagesse et de discernement, alors que nous ne nous sommes jamais rencontrés de visu.
A Pâques cependant, il ne répond pas à mon dernier mail.
Ces jours-ci, je suis très occupée par mes rangements à la maison, je déplace et je trie des piles de documents et de courrier, parmi lesquels ses dernières lettres. Décidée à mettre de l’ordre dans tout cela en me procurant un trieur, je me dis ce soir que je vais lui écrire, à lui et à un autre vieil ami prêtre, pour prendre de leurs nouvelles et leur donner des miennes.
Mais d’abord, saisie d’un doute, je tape son nom sur un moteur de recherche, et là m’arrivent en nombre les avis mortuaires le concernant…
Voilà. Il avait donc, cet été, rendez-vous avec Celui pour lequel il a dépensé tant et tant d’énergie sa vie durant. Je ne lirai donc plus son écriture sur une enveloppe qui me réjouissait toujours. Mon vieil ami s’est endormi, et j’ai déjà deux semaines de retard pour lui souhaiter un bon voyage vers la terre de la plénitude à laquelle il aspirait…
Serviteur bon et fidèle, entre dans la joie de ton Maître !
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