Mon billet déplaira aux adeptes de la théorie du genre, mais je médite sur cette question depuis longtemps, et je crois profondément qu’une femme, encore plus qu’un homme, a besoin d’un “chez soi” stable et agréable sur le long terme. Son équilibre personnel y est lié. J’ai observé régulièrement, à l’âge où les connaissances de ma génération avaient leurs premiers enfants, que c’était la femme, dans le couple, qui incitait à l’achat ou à la construction d’une maison ou d’un appartement plus spacieux. Pourquoi devrions-nous nier que nous désirons “un nid” où voir grandir heureux nos enfants ? Certes, l’homme s’investit ensuite souvent beaucoup dans ladite construction ou rénovation, mais nous demeurons celles qui soignent la déco, qui rendent agréable et pensent fonctionnel leur lieu de vie.
Comme je ne suis plus une jeune femme prise par les exigences d’un tel projet initial, j’observe encore ce qui se joue à ma génération et à la suivante, et je constate avec grande tristesse des drames de séparation dans lesquels, outre les répercussions sur les enfants, se joue l’enjeu de l’habitation commune. Très souvent, j’ai vu des femmes se battre et s’endetter pour conserver vaille que vaille leur maison. Soit qu’elles soient quittées, et alors c’est vraiment la moindre des choses qu’elles puissent demeurer chez elles, soit que le couple n’en puisse plus, les situations les plus cruelles auxquelles j’assiste sont celles où une épouse ou compagne est contrainte de quitter sa demeure avec ses enfants. Tout ce qu’elle avait voulu construire – même si le lieu de vie appartenait davantage au conjoint – s’écroule. Et c’est dans ces circonstances que la paupérisation s’installe. Il faut trouver un nouveau logement locatif, se remeubler, avec le souci de redonner aux enfants un cadre de vie sécurisant. J’avoue que, témoin de deux situations semblables récemment, j’en ai été choquée et très attristée pour ces jeunes mamans obligées de rebondir dans des circonstances aussi difficiles. Sans compter l’incompréhension des enfants qui perdent le nid où ils ont grandi pour ne plus y voir que leur papa de temps en temps.
J’ai eu cette chance, dans mon propre divorce, d’avoir pu conserver, pour mes enfants et moi, la maison que j’avais pensée, voulue, aménagée à la trentaine. Les années passant, quelques nouveaux travaux s’imposaient. Une femme seule qui n’est pas bricoleuse les repousse souvent pendant de longues années, faute d’aide et de moyens.
Voilà. Je viens de passer six semaines avec un artisan chez moi tous les jours. Indispensable mais éprouvant. J’ai mesuré à quel point j’avais besoin de me sentir “chez moi”, ne l’étant plus vraiment, entre sa présence pas toujours discrète, le sous-sol envahi par ses outils divers, ses va-et-vient nécessaires dans presque toutes les pièces de la maison. Il a réalisé un travail patient et méticuleux dont le résultat m’enchante. Mais plus encore, je vais apprécier d’être de nouveau chez moi, seule, au calme, sans avoir de comptes à rendre à personne, et, cerise sur le gâteau, avec un gain de confort et d’esthétique fort agréable.
Alors, si j’ai un message à faire passer aux femmes qui me lisent, c’est : Battez-vous, quelles que soient les circonstances de votre vie, pour conserver le lieu où vous aimez vraiment vivre. Ce sera difficile et au prix d’un appauvrissement certain. Mais contrairement à ce que l’on nous serine souvent lors d’une séparation, on ne rebondit pas mieux, pour se reconstruire, dans un “petit appartement” où tout est à redéfinir en plus du bouleversement des circonstances familiales.