Parfois, j’aimerais, comme Jésus, pouvoir dire à la mer déchaînée : « Silence, tais-toi ! » et qu’il se fasse un grand calme… (Marc 4, 39) Mais j’ai compris depuis longtemps que la mer, toujours, d’une façon ou d’une autre, se déchaînerait contre mon entourage proche et contre moi. Que même une prière intense ne suffirait pas, parfois, à calmer les furies de la tempête.
Déjà, la Genèse l’annonçait : “Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, entre ta descendance et sa descendance : celle-ci te meurtrira la tête, et toi, tu lui meurtriras le talon.” (Genèse 3, 15)
Toujours il revient, larvé, lové aux recoins de mon existence, ce serpent des origines. Oh, il n’a plus beaucoup de prise sur moi : depuis longtemps, je sais l’identifier et ne plus le laisser pénétrer ma conscience. Je le reconnais de loin et je suis affûtée à résister à toutes ses tentations. Mais il essaie, encore et encore, de me déstabiliser, de me fragiliser, de me discréditer même auprès de ceux qui auraient toutes les raisons d’avoir confiance en moi, par ses manœuvres perverses et rusées. Il s’empare volontiers d’une personne ayant un peu d’ascendant sur moi pour lui murmurer de me harceler à petit feu, jour après jour, année après année, jaloux qu’il est de la sérénité que j’ai gagnée à grand prix dans ma lutte contre lui avec le Seigneur à mes côtés.
Cette jalousie du malin ne se rassasie jamais de miner mon quotidien.
Me voilà à un tournant de ma lutte silencieuse contre lui. Vais-je enfin donner de la voix ? Vais-je oser le faire taire en en référant à plus autoritaire et clairvoyant que lui ?
Car il est assez stupide, le serpent des origines. Il met les gens dans de petites cases. Il ne sait pas les cerner psychiquement, et encore moins spirituellement. Il hait la foi en Dieu de l’autre, mais il s’en sert : “Celle-ci est bien trop chrétienne et honnête pour oser dénoncer mes manœuvres un jour, alors allons-y, détruisons sa confiance en elle et son moral jusqu’au bout !”
« Silence, tais-toi ! »
Ce n’est pas moi qui prononcerai cette injonction, car je ne suis pas Jésus, et je ne puis avoir l’autorité d’un disciple homme contre le malin. Mais des alliés, j’en ai. Et ils sauront intimer à la tempête de se calmer et de laisser ma barque poursuivre sa traversée sur des flots désormais tranquilles. J’ai foi dans le Seigneur. De façon inébranlable.
Image : Le Christ dans la tempête sur la mer de Galilée Rembrandt 1633