Le début de mon année scolaire a été troublé par ce dilemme lancinant : allais-je perdre mon poste d’institutrice dans cette école que j’aime depuis si longtemps, au cœur du village que j’avais choisi entre tous pour y habiter ? Le risque était réel, et je devais prendre une décision importante : aller enseigner ailleurs, ou alors, décider de rester pour prendre la direction de l’école, une responsabilité que je n’avais jamais envisagée jusque là. Eh bien, aussi étrange que cela puisse paraître, un des éléments qui m’a aidée à prendre ma décision, c’est le fait que depuis une quinzaine d’années, dès que je traverse le village en voiture, les petites mains des enfants se lèvent pour me saluer longuement, avec leur plus beau sourire. Un geste affectueux auquel je réponds toujours avec grande joie.
Dans mes prospections d’affectation, plusieurs opportunités se présentaient ailleurs, hors de ma vallée. J’y pensais sans joie. Je n’aime guère conduire de nuit, et l’hiver est bien long. Et délaisser cette petite école de mon village, qui me tient tellement à cœur ! Un jour que je passais au volant devant un ensemble de pavillons où vivent plusieurs de mes élèves, les salutations furent appuyées et touchantes. Et je me suis dit : “Voilà, si je quitte cette école, d’ici deux ou trois ans, les enfants de mon village ne me connaîtront plus, et les petites mains ne s’agiteront plus à mon passage. Je verrai des visages sur lesquels je ne saurai plus mettre de prénom. Et je rentrerai chez moi le soir sans avoir eu l’occasion de féliciter un jeune couple du voisinage pour la naissance du petit frère, sans avoir revu à la porte de l’école un grand collégien qui vient raconter ses découvertes et ses projets tout en étant ému de revoir les lieux de son enfance épanouie.”
Cela a été un des éléments déclencheurs. L’envie de prendre plus de responsabilités n’était pas première. Elle a suivi ce mouvement d’amour pour la population si attachante de mon village. Mais à présent, tout me semble couler de source. Je reviens d’une formation sur la difficile fonction de directeur d’école, et je suis persuadée à présent d’avoir fait le bon choix. Je vais avoir un travail énorme, en surplus de ma classe à plein temps. Mais ici, pour ces enfants que j’aime. Dans cette communauté villageoise avec laquelle je désire encore davantage faire corps.
4 commentaires
Ravi pour toi de de l’écriture de cette nouvelle page pleine de promesse. Ta situation résume hélas celle de nombreuses “petites” écoles de village qu’il faut absolument préserver, pour continuer à bénéficier d’une vraie relation de proximité ainsi que d’un environnement de vie qui est forcément une partie de toi.
Tu as tout mon soutien. Bonne chance à toi, bises.
Franck
Merci Franck pour ton message sympathique et qui me touche ! Je souhaite vraiment la pérennité de ma petite école de village, oui. Amitiés, 🙂
Certes il n’est jamais facile de prendre une décision… mais je pense que tu as fait le bon choix!
Avec toute ma sympathie et mes encouragements
Merci Eliane ! Amitiés ! 🙂