Je n’étais plus allée à Paris depuis presque quinze ans, alors rien qu’en revoyant la Tour Eiffel, mon cœur s’est mis à battre dans une joie inexprimable. Quel plus beau symbole que celui-là de notre appartenance à notre si beau pays de France et de notre attachement à Paris resplendissant sous un soleil de plomb, dans le flot des touristes du monde entier se retrouvant au carrefour des harmonies urbaines ?
Paris, tu m’as émerveillée ! Des trésors du musée d’Orsay au Sacré Cœur rayonnant de lumière dans un ciel bleu intense, je suis allée d’éblouissement en éblouissement, impatiente de découvrir un nouveau quartier à chaque sortie de métro, avide de capturer la beauté de notre capitale dans mon appareil photo et mes yeux écarquillés. Alternance de foisonnement de lumière, de reflets de Seine et de fraîche pénombre des églises et de Notre Dame, je ne suis pas sortie de l’enchantement, donnant libre cours à mon insatiable curiosité de touriste comme à la grâce de la prière sublimée par des lieux de haute spiritualité et de longue histoire des hommes.
Et si ce n’était que cela !
Non, mon bonheur était complet, car au détour de chaque jour, j’ai rencontré des amis, visages connus ou découverts, pour des têtes-à-têtes délicieux, en toute confiance, intérêt réciproque et profondeur de dialogue. Que de moments inoubliables autour d’un verre ou d’un repas ! Que d’amitiés renforcées par ces rendez-vous heureux !
Je n’ai pas perdu de vue pour autant, dans cette intense semaine de joie, la difficulté de vivre de mon prochain. Cette femme dans le métro, que je voulais aider à porter ses quatre ou cinq gros sacs, et qui me rétorque agacée qu’elle les trimballe tous les jours puisqu’elle fait la manche. Cette bien-aimée qui fond en larmes en face de moi parce que la dépression est là, larvée, qui la guette. Cette femme lumineuse dont les yeux se troublent quand elle évoque sa fille décédée subitement. Cette amie juive qui m’emmène en partage dans la rue des Rosiers et me signale les plaques commémorant de violents attentats. Cet ami très cher que je suis venue ici porter dans une ardente prière, pour que la maladie extrême ne me l’arrache pas. Et la voix vacillante de ma fille au téléphone, qui m’annonce qu’un de ses amis est entre la vie et la mort, plus près de la mort que de la vie. Je n’aurai plus de cesse de m’abîmer dans la prière et d’allumer pour lui, pour eux, des bougies dans tous les lieux saints que je visite.
Le train me ramène chez moi, les souvenirs sont si denses que je ne parviens pas à prendre un livre en main.
Retrouver mon chez moi. Vider une valise qui était bien trop lourde.
Un message de ma fille partie loin à son chevet : il est sorti du coma ! Il va bien, et il est heureux de la voir !
Grâces soient rendues au Très-Haut pour tant de magnanimité !