En ce temps-là, les disciples de Jésus lui dirent : « Voici que tu parles ouvertement et non plus en images.
Maintenant nous savons que tu sais toutes choses, et tu n’as pas besoin qu’on t’interroge : voilà pourquoi nous croyons que tu es sorti de Dieu. »
Jésus leur répondit : « Maintenant vous croyez !
Voici que l’heure vient – déjà elle est venue – où vous serez dispersés chacun de son côté, et vous me laisserez seul ; mais je ne suis pas seul, puisque le Père est avec moi.
Je vous ai parlé ainsi, afin qu’en moi vous ayez la paix. Dans le monde, vous avez à souffrir, mais courage ! Moi, je suis vainqueur du monde. »
Jean 16, 29-33
Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible – © AELF, Paris
Parfois, ici, je joue les trouble-fêtes. Je pense à l’homélie que j’ai entendue au jeudi de l’Ascension ailleurs que dans ma paroisse, une jolie homélie rassurante pour des paroissiens âgés qui avaient demandé une intention de messe. Le célébrant disait en substance qu’au moment de la mort, si nous sautions avec confiance dans le vide comme un enfant qui veut échapper à un incendie au premier étage de sa maison et entend son papa l’appeler en bas, nous atterririons dans les bras de Père qui nous voit même si nous ne l’apercevons pas à travers l’épaisse fumée. Et que donc, à l’instant de la mort, il suffisait de sauter en toute confiance pour se retrouver entre les bras de Dieu.
Nos prêtres sont habitués à donner ce type d’homélie pour les funérailles, il faut réconforter ceux qui sont en deuil, rassurer sur le sort du défunt, quelle qu’ait été sa vie réelle…
Alors certes, je ne suis pas à la veille de mourir étant donné mon âge et ma santé, et je ne cherche pas à ce que l’on me rassure devant la mort. Mais tout de même, je trouve que nous nous fourvoyons un peu dans le langage ecclésial contemporain. Cette manie de prêcher que la vie éternelle nous est acquise sans que l’existence que nous aurons menée ici-bas n’ait à être prise en compte ! Cette habitude de faire croire que quelques sacrements sont l’unique nécessaire pour nous garantir le salut ! Pourquoi les responsables religieux se plaignent-ils que les églises soient vides, alors qu’ils prêchent à longueur de funérailles qu’ “on ira tous au paradis” ? A les entendre, son nom dans un registre de baptême et si possible avoir communié au moins une fois dans sa vie paraissent des vaccins contre le néant – voire pire – qui pourrait nous guetter après la mort…
Si je m’exprime encore et encore sur un tel sujet, ce n’est pas par option personnelle ou par esprit de contradiction. Non, c’est par connaissance intime de quelques mystères du salut en Christ et des vérités essentielles de sa Parole dans l’Evangile.
L’Eglise aujourd’hui prêche : “Dieu veut notre bonheur.” Tous les auditeurs sont contents et comprennent “dès ce monde”. Or, ce n’est pas du tout ce que Jésus nous a promis : “Dans le monde, vous avez à souffrir, mais courage !” Et là, les plumes théologiques et les claviers catholiques se préparent à me rétorquer que le temps du “dolorisme” est révolu.
Je suis habituée à ce que les contre-arguments fusent quand je m’exprime sur ces sujets-là. Mais je persévère, non pas pour me démarquer, mais par réel souci du salut de mon prochain.
Le “monde” dans lequel nous vivons ici-bas n’est qu’une terre de pèlerinage vers le Royaume que le Christ incarné puis ressuscité nous a promis, en vertu de sa miséricorde, certes, mais aussi si nous vivons selon ses commandements ! Et je redis ici que les commandements de Jésus sont inscrits dans l’Evangile bien plus sûrement et clairement que dans le catéchisme de l’Eglise catholique.
Alors oui, pour un/e disciple authentique du Christ, ce monde-ci est souvent une terre de souffrance, car le chrétien véridique ne vit pas selon les préceptes du monde. Certes, il est appelé à obéir à toute la loi civile, mais si cette loi lui demande d’aller jusqu’à renier son Seigneur et ses commandements, il doit témoigner avant tout de sa fidélité à son baptême et à la Parole indépassable du Verbe de Dieu. Le chrétien doit vivre une vie évangélique envers son prochain, et au cœur d’un monde qui suit la pente inverse, s’offrir à Dieu, dans une foi profonde, pour mendier s’il est possible le salut de tant de ses contemporains qui se fourvoient dans des voies d’égoïsme et de complaisance pour la dictature du pouvoir et de la jouissance terrestres. Au risque de leur salut.
Image : Christ à la Croix El Greco XVIe Musée des Arts catalans, Barcelone
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Ne soyez pas nombreux à vouloir être docteur de la loi. Nous n’en serons jugé que plus sévèrement.