Moi, Esdras, à l’heure de l’offrande du soir, je me relevai de ma prostration ; le vêtement et le manteau déchirés, je tombai à genoux ; les mains tendues vers le Seigneur mon Dieu, je dis : «Mon Dieu, j’ai trop de honte et de confusion pour lever mon visage vers toi, mon Dieu. Nos fautes sans nombre nous submergent, nos offenses se sont amoncelées jusqu’au ciel. Depuis les jours de nos pères et aujourd’hui encore, grande est notre offense : c’est à cause de nos fautes que nous avons été livrés, nous, nos rois et nos prêtres, aux mains des rois étrangers, à l’épée, à la captivité, au pillage et à la honte, qui nous accablent encore aujourd’hui.”
Esdras 9, 5-7
En ce temps-là, Jésus rassembla les Douze ; il leur donna pouvoir et autorité sur tous les démons, et de même pour faire des guérisons ;
il les envoya proclamer le règne de Dieu et guérir les malades.
Il leur dit : « Ne prenez rien pour la route, ni bâton, ni sac, ni pain, ni argent ; n’ayez pas chacun une tunique de rechange.
Quand vous serez reçus dans une maison, restez-y ; c’est de là que vous repartirez.
Et si les gens ne vous accueillent pas, sortez de la ville et secouez la poussière de vos pieds : ce sera un témoignage contre eux. »
Ils partirent et ils allaient de village en village, annonçant la Bonne Nouvelle et faisant partout des guérisons.
Luc 9, 1-6
Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible – © AELF, Paris
C’est volontairement que je mets en parallèle l’évangile du jour avec un extrait de la première lecture d’aujourd’hui. Car si les deux semblent a priori ne pas avoir de rapport entre eux, une correspondance très actuelle me saisit.
Revenons sur le péché des Israélites déploré ici par Esdras : durant leur exil à Babylone entre 587 et 538 avant Jésus Christ, nombre d’entre eux ont épousé des femmes étrangères de peuples idolâtres. Au retour à Jérusalem, ils vont devoir s’en séparer – le temps des fêtes juives ou pour toujours, tous les traducteurs bibliques ne sont pas d’accord entre eux – pour préserver la pureté du peuple élu et revenir aux commandements de leur Dieu.
Loin de moi l’idée de m’indigner du Premier Testament et de proclamer que ce Dieu n’est pas le nôtre et que ces écrits sont “caduques”. Ce qui est écrit est écrit, et personnellement, je trouve des enseignements très profonds dans la foi de nos frères aînés juifs. Ce qui est en cause ici, c’est un manquement à la fidélité aux préceptes de Dieu. On pourra aujourd’hui ne pas comprendre que Dieu ait proscrit aux fils d’Israël le mariage avec des femmes non-juives, ce n’est pas pour autant le moment d’entrer en contestation avec Lui. “Mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos chemins ne sont pas mes chemins” (Isaïe 55, 8) Laissons à Dieu sa propre logique. Et nous, respectons ses commandements.
Le parallèle que je perçois entre la désolation d’Esdras pour le péché du peuple élu et l’évangile du jour, c’est qu’en Eglise, ces derniers siècles – voire depuis plus longtemps – notre clergé s’est tenu bien loin des commandements de Jésus concernant ses apôtres. Pauvreté absolue, dépouillement, itinérance et très certainement célibat – quoi que pourraient m’objecter nos contemporains catholiques “progressistes” – qui reconnaît encore un de nos prêtres ou évêques dans ce portrait pourtant donné par le Christ Jésus lui-même ? Ceux qui se conforment à ces exigences, de saint François d’Assise à Charles de Foucault, sont tellement rares que l’on en fait des saints !
Quant à l’impureté du peuple d’Israël que déplore ici Esdras, que dire de l’impureté contemporaine de notre clergé ? Ces dernières années n’ont fait que mettre en lumière de manière crue de très graves fautes contre le sacerdoce et l’humanité de la part de ceux qui sont censés marcher à la suite du Seigneur Jésus et nous enseigner d’abord par l’exemple sa Parole. Crimes pédophiles et omerta complice dans l’Eglise à leur sujet, abus sexuels ou spirituels sur des fidèles jeunes ou adultes et jusqu’à l’abomination de ravir à des religieuses leur chasteté !
Un nouvel Esdras se lèverait-il aujourd’hui, oui, il aurait de lourdes raisons de pleurer vers Dieu sur l’abomination d’une frange de cette Eglise qui se croit toujours élue du Christ sa tête.
“Nos fautes sans nombre nous submergent, nos offenses se sont amoncelées jusqu’au ciel.”
A méditer si on nourrit encore l’espoir que l’Eglise puisse continuer à faire l’arrogante sur les décombres de sa moralité bafouée.