En ce temps-là, Jésus s’écria : « Celui qui croit en moi, ce n’est pas en moi qu’il croit, mais en Celui qui m’a envoyé ;
et celui qui me voit voit Celui qui m’a envoyé.
Moi qui suis la lumière, je suis venu dans le monde pour que celui qui croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres.
Si quelqu’un entend mes paroles et n’y reste pas fidèle, moi, je ne le juge pas, car je ne suis pas venu juger le monde, mais le sauver.
Celui qui me rejette et n’accueille pas mes paroles aura, pour le juger, la parole que j’ai prononcée : c’est elle qui le jugera au dernier jour.
Car ce n’est pas de ma propre initiative que j’ai parlé : le Père lui-même, qui m’a envoyé, m’a donné son commandement sur ce que je dois dire et déclarer ;
et je sais que son commandement est vie éternelle. Donc, ce que je déclare, je le déclare comme le Père me l’a dit. »
Jean 12, 44-50
Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible – © AELF, Paris
Faut-il encore le dire et le répéter : Jésus n’est pas Dieu à lui tout seul ! Il est en interaction permanente avec le Père, et nous révèle ici une donnée essentielle : ce qu’il enseigne est conforme à ce qu’il a lui-même reçu du Père, qui reste et demeure la première Personne de la Trinité Sainte. La Volonté divine pour notre équilibre et notre équité est premièrement dans le Père qui est à l’origine du monde et de l’être. Jésus lui-même s’origine dans le Père, et à ce titre il reçoit de Lui le commandement divin pour lui-même et pour ses frères et sœurs en humanité.
J’ai souvent constaté, en lisant ici ou là des contributions de chrétiens, que la nature du Christ Jésus ne leur était pas très claire. Certains affirment avec un peu trop d’assurance : “Jésus est Dieu !”, tandis que d’autres sont gênés par cette affirmation qui met leur foi en difficulté. Et je les comprends. Comment un homme, incarné dans la chair humaine – qui plus est masculine – pourrait-il “être Dieu” ? Cette affirmation un peu trop rapide a donné cours au fil des siècles à cette conception tout à fait erronée d’un Dieu Père représenté dans l’iconographie et les consciences comme un vieillard ayant tout d’un homme masculin. De là la prétention des hommes mâles à être les images privilégiées de Dieu, ce qui les autoriserait à soumettre à leur domination exclusive la moitié féminine de l’humanité. Nous savons trop bien ce que cette conception orgueilleuse et abusive a causé – et cause encore – comme tort à toutes les femmes et filles à travers les âges. Cela pouvant aller jusqu’à la négation de la grâce reposant sur toute créature féminine en glorifiant les naissances de fils aux dépends de celles de filles et en cherchant même à éliminer ces dernières in utero ou à la naissance. L’orgueil mâle joue dans ces pratiques barbares un rôle prédominant.
Revenons-en à Jésus, incarné en un corps d’homme, mais qui s’est toujours montré si différent de ses frères en humanité, ses contemporains ou à travers les âges, par sa douceur, son humilité, son absence de pouvoir en quelque domaine que ce soit, son refus de répliquer aux outrages par la violence et sa constante prévenance envers toute femme qu’il a rencontrée. C’est là l’image de Dieu que nous devons retenir. Jésus incarné homme, oui, mais à l’image d’un Père n’ayant aucun des travers communs aux hommes mâles parce qu’il n’est pas un Dieu “exclusivement mâle” ! Ne perdons jamais de vue ce verset de Genèse 1, 27 :
Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme.
Quant à la Parole du Christ Jésus, elle trouve sa source et sa cohérence dans le Père, première Personne de la Trinité, c’est dans un dialogue de prière incessant avec l’Eternel son Dieu que Jésus trouve ses préceptes et ses arguments, soutenu par la fréquentation des Ecritures du peuple juif. L’humanité revêtue par le Verbe le rend proche de nous, au milieu de nous, mais il demeure fils de Marie autant que Fils de Dieu, et à ce titre, il n’est pas “Dieu fait homme”, abus de langage qui peut troubler les quêteurs de Dieu les plus honnêtes.
Que l’on ne se méprenne pas : je ne place aucun précepte religieux ou humain au-dessus de l’Evangile. Je crois profondément en cette parole de Jésus ci-dessus :
Celui qui me rejette et n’accueille pas mes paroles aura, pour le juger, la parole que j’ai prononcée : c’est elle qui le jugera au dernier jour.
Oui, dans l’Evangile, nous avons tout le code du “vivre ensemble” et le secret du salut. Mais je pense qu’il peut être pardonné, au moment du passage décisif qu’est la mort ou du jugement dernier, de n’avoir pas reconnu Jésus comme Fils de Dieu et Seigneur. En effet, l’Eglise censée transmettre la foi au Christ a donné et donne encore un tel contre-témoignage à sa Parole de vie ! Elle est devenue plus souvent un obstacle à la foi que sa voie d’excellence. Aussi, je pense personnellement que le salut est possible en menant une vie droite, honnête, généreuse, respectueuse du prochain, ce qui est la propre de bien des femmes et des hommes qui mettent en pratique l’Evangile sans même en avoir conscience, soit qu’ils l’ignorent, soit qu’il appartiennent à une autre tradition religieuse, soit qu’ils aient été catéchisés voire baptisés et n’aient gardé, même inconsciemment, que les valeurs de la Parole de Jésus tout en rejetant l’Eglise.
A mon sens, il n’est pas indispensable d’être un chrétien affirmé pour obtenir le salut, pourvu qu’on mène une vie conforme aux enseignements fondamentaux de l’Evangile, volontairement ou non, consciemment ou non, rien n’étant au-dessus de cette parole de Vérité et de Vie. Puisque Jésus l’affirme lui-même ici :
Le Père lui-même, qui m’a envoyé, m’a donné son commandement sur ce que je dois dire et déclarer.
Faire la Volonté de Dieu, c’est donc vivre selon cette Parole-là. Et c’est déjà beaucoup.