En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour.
Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour.
Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. »
Jean 15, 9-11
Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible – © AELF, Paris
Remarquons-nous encore, de nos jours, le “si” qui introduit le verset cité en titre ?
“Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour.“
Si vous gardez mes commandements !
Nous ne sommes pas – ou plutôt plus – trop habitués à ce que Jésus semble mettre des conditions à son amour et à sa grâce. Récemment, je soulignais sur les réseaux sociaux les exigences de Jésus à notre égard et les souffrances que nous avons à endurer à sa suite. Une commentatrice répondit par ces seuls mots : “Sola gratia”. Deux mots qui visaient à annihiler poliment et théologiquement mon témoignage.
Je ne veux aucunement entrer ici dans une controverse théologique qui n’a déjà que trop duré et qui oppose traditionnellement défenseurs des œuvres de charité et tenants de la grâce seule de Dieu pour notre salut. Pourquoi fouiller toujours dans les Epîtres pour trouver une réponse claire à ce dilemme ? Jésus n’est-il pas plus qualifié que Pierre, Paul ou Jacques pour nous révéler si nous sommes, oui ou non, tenus de participer personnellement à notre perspective de salut ?
Or Jésus pose bel et bien une condition ici : Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour.
Si vous gardez mes commandements !
Depuis de longues années, je suis régulièrement contestée quand je parle de jugement, de justice de Dieu autant que de miséricorde, et que j’avance que les grands criminels ne seront pas nécessairement “les plus grands saints”, comme je l’ai entendu un jour dans la bouche du prédicateur vedette Michel-Marie Zanotti-Sorkine… D’où vient donc cette obsession d’une frange de l’Eglise de faire du péché le sine qua non de la grâce et de l’accès possible à la sainteté ? N’est-ce pas plutôt que ce gouvernement exclusivement masculin de l’Eglise veut masquer et auto-absoudre ses propres crimes pour faire croire aux fidèles que “Dieu pardonne tout, absolument tout” ? (Pape François).
Loin de moins l’idée de minorer voire de nier la miséricorde divine. J’en ai bénéficié comme tout un chacun. Mais je dis et je maintiens qu’il y a un gouffre entre ma grand-mère paternelle ou sa fille, ma tante, femmes d’une piété irréprochable tout au long de leurs vies respectives, ne mentant jamais, ne prononçant jamais de paroles blessantes, dévouées dans le service sans limite et pleines d’amour pour tout un chacun autour d’elles, et les tueurs en série qui défraient nos chroniques ou les dictateurs qui déclenchent par orgueil et volonté de conquête des guerres ravageuses.
Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour.
On dit très souvent de nos jours : “Dieu n’aime pas le péché, mais il aime le pécheur”. Certes. J’ajouterais pour ma part : “le pécheur qui se convertit authentiquement et qui fait amende honorable”. Mais comment faire, en outre, amende honorable quand la fillette violée et assassinée ne reviendra jamais à la vie, quand le soldat ou le civil ukrainien sont morts pour toujours ?
Parce que j’aime plus que tout dans ma vie le Christ Jésus, que je m’efforce autant que je peux de demeurer dans ses commandements, qu’il m’offre la grâce de me convier à une intimité profonde avec Lui, je sais un peu désormais ce qu’il aime et ce qu’il désapprouve. Il me l’a déjà assez fait sentir en ma propre personne, et j’en parle par expérience et non par savoir théologique. Et donc, je réitère mes propos : pour demeurer dans son amour, oui, il faut garder ses commandements. Comme lui-même a gardé ceux de son Père, s’il est toutefois possible en notre faible nature humaine de l’imiter un tant soit peu. Mais Jésus ne déborde pas d’amour mièvre et de miséricorde dégoulinante pour qui fait le mal sciemment et sans aucun repentir. Cessons de nier toutes les pages d’Evangile dans lesquelles il se montre absolument clair sur la perspective d’un jugement final, et sur sa Parole – c’est-à-dire ses commandements – qui nous jugera tous le moment venu, que ce soit à celui de notre mort ou de son propre retour en gloire.