Le Christ n’est pas entré dans un sanctuaire fait de main d’homme, figure du sanctuaire véritable ; il est entré dans le ciel même, afin de se tenir maintenant pour nous devant la face de Dieu.
Il n’a pas à s’offrir lui-même plusieurs fois, comme le grand prêtre qui, tous les ans, entrait dans le sanctuaire en offrant un sang qui n’était pas le sien ;
car alors, le Christ aurait dû plusieurs fois souffrir la Passion depuis la fondation du monde. Mais en fait, c’est une fois pour toutes, à la fin des temps, qu’il s’est manifesté pour détruire le péché par son sacrifice.
Et, comme le sort des hommes est de mourir une seule fois et puis d’être jugés,
ainsi le Christ s’est-il offert une seule fois pour enlever les péchés de la multitude ; il apparaîtra une seconde fois, non plus à cause du péché, mais pour le salut de ceux qui l’attendent.
Lettre aux Hébreux 9, 24-28
Textes liturgiques©AELF
L’Epître aux Hébreux dérange et nombreux sont les théologiens qui désireraient la passer sous silence, tant la notion de sacrifice du Christ sur la Croix les insupporte. En tordant le sens de la rédemption, ils se récrient à l’idée d’un Dieu “vengeur” et “sanguinaire”. Je ne cesse de m’ériger contre ces abus de langage.
Dieu n’est ni vengeur ni sanguinaire, par contre il est parfaitement lucide sur les limites de ses créatures. Et si ses créatures sont à ce point enclines au péché, il fallait bien que l’antithèse du péché, à savoir le Christ Jésus qui en a été toute sa vie terrestre totalement dépourvu, prenne sur lui la méchanceté des hommes, en Agneau de parfaite innocence, non pas pour satisfaire son Père – quelle erreur que ce postulat ! – mais bien plutôt pour offrir aux hommes l’ayant mis à mort directement ou implicitement une chance de repentance pour toutes leurs fautes contre les innocentes et les innocents à travers les âges…
Considérer le Christ humilié, martyrisé, mort sur la Croix et en éprouver du remords, c’est le premier mouvement vers le salut. C’est une chance offerte de briser la coque de dureté de son cœur.
C’est une opportunité de retour vers un Dieu magnanime qui, plutôt que de se désintéresser de ses créatures tellement enclines au mal, a fait don de sa propre chair en son Fils incarné pour que l’homme puisse éprouver un soupçon de compassion en contemplant cette vie immolée par amour.
Aimer Jésus, déplorer son supplice, reconnaître son innocence, c’est fouiller en son intimité personnelle pour en faire émerger l’humanité qui nous fut offerte et que trop souvent le péché enfouit sous une opaque épaisseur de malfaisance.
Comprendre cela, c’est déjà le début de la foi chrétienne.
Mais cependant notre foi ne devrait pas s’arrêter là.
“Il apparaîtra une seconde fois, non plus à cause du péché,
mais pour le salut de ceux qui l’attendent.”
Oui, le Christ n’a pas cessé de l’annoncer, il revient, en un second avènement qui ne le verra ni dans une crèche, ni sur une croix.
Il revient, et cette fois glorieux, de cette Gloire qu’il tient de son Père qui lui a donné “tout pouvoir sur la terre et dans les cieux” (Matthieu 28, 18), il revient en Roi de gloire pour nous mener, si toutefois nous l’attendons et le désirons, vers un Royaume promis de toute éternité où la mort et les larmes ne seront plus.
C’est la raison pour laquelle il nous appartient de mettre en pratique sa Parole consignée dans les Evangiles, qui sont tout de même à notre disposition depuis quelque vingt siècles, et ce de la manière la plus facilement accessible à l’heure du net !
Non Jésus ne revient plus “à cause du péché”, et gardons-nous de le prendre pour un passeur d’éponge qui ne tiendrait aucun compte de nos faits et gestes au cours de notre vie terrestre !
Le salut est une affaire éminemment importante, et n’écoutons pas ceux qui, empêtrés dans leurs propres torts, voudraient nous faire croire que, d’ores et déjà, “tout est pardonné” et que le “paradis” est déjà ouvert présentement à qui “veut bien” y entrer ! Quelle vision erronée du salut ! La mort n’est pas une sorte de “Black Friday” de la miséricorde, une foire au salut dans laquelle il suffirait de miser sur le bon Jésus pour entrer dans la béatitude éternelle en faisant l’économie d’une prise de conscience cuisante de sa propre indignité !
Il y a la mort, qui signifie bilan incompressible de sa vie terrestre, et il y a aussi le retour du Christ en gloire qui s’imposera aux vivants d’une manière éclatante et incontournable. Alors seront connus les désirs profonds des cœurs et des âmes.
Aurons-nous attendu, désiré ce Roi des temps messianiques, aurons-nous pratiqué le bien, serons-nous prêts à quitter tout ce qui est terrestre pour Le suivre vers ce Royaume qui court à travers toutes les Ecritures comme but ultime de l’humanité ?
Ou nous trouvera-t-il alanguis, adonnés aux passions futiles, satisfaits d’une vie égoïstement acceptable, nantis sans partager, nous contentant d’une vie religieuse faite de rites et de vaines célébrations sans foi réelle ?
“Il apparaîtra une seconde fois, non plus à cause du péché,
mais pour le salut de ceux qui l’attendent.”
Serons-nous vraiment de ceux qui l’attendent ?
Image : Christ de la chapelle des Apparitions à Paray-le -Monial