Prédication de Mgr Norvan Zacharian, primat de l’Eglise apostolique arménienne à Paris, le 20 janvier 2013 (célébration télévisée)
Frères et sœurs en Christ, ma joie est grande de me trouver en ce jour à vos côtés, à l’occasion de cette nouvelle Semaine de prière pour l’Unité des chrétiens, ici, à Marseille, sans doute la première ville de Gaule à avoir accueilli les premiers immigrants chrétiens venus d’Asie mineure. Je pense en particulier à saint Irénée, au 2e siècle et à Grégoire de Tallard, un saint arméno-provençal du 5e siècle.
Il y a près de 35 ans, alors que j’étais évêque des Arméniens de Rhône-Alpes, je participais pour la première fois à cette célébration, et depuis, et pas plus tard qu’il y a quelques jours à Paris, je n’ai jamais manqué cette occasion de marcher avec mes frères évêques, prêtres et pasteurs dans les pas du Seigneur, en priant avec eux, pour notre unité.
« Marcher », voilà un mot, un verbe, qui n’est pas étranger aux chrétiens que nous tentons d’être. Car en vérité, notre démarche commune n’est-elle pas de marcher dans les pas du Seigneur pour rechercher son intimité et la proximité de nos frères en humanité, qu’ils soient chrétiens ou pas ? Notre baptême commun, n’est-il pas le début d’une longue marche qui durera tant que nous vivrons, avec et vers, notre Créateur ? Et ne sommes-nous pas tous, comme chrétiens, des pèlerins, ontologiquement donc des « marcheurs de Dieu », témoins et glorificateurs du Seigneur au sein de sa création.
En entendant la voix du prophète Michée, comment ne pas faire souvenir de ce jeune homme dont l’évangéliste Matthieu nous dit qu’il était riche et souhaitait gagner la vie éternelle, et qui interrogeait le Christ sur ce qu’il devait faire pour y parvenir ? Jésus, après lui avoir demandé d’appliquer tous les commandements de Dieu, ce que le jeune riche prétendait avoir fait, lui recommande de renoncer à ses biens matériels pour les donner aux pauvres et pour le suivre : « Suis-moi » (Saint Jean 1, 23). Nous assistons là à une invitation très concrète à marcher avec lui, dans un but évident que tout le monde aura compris : pour « faire le bien et la Justice » et gagner ainsi son salut.
Plus que jamais sans doute, c’est aujourd’hui de bonté et de justice que notre monde à faim, tout autant que de pain. Et pourtant, on peut dire qu’aujourd’hui, comme il y a deux mille ans, s’engager dans les pas de Dieu, pour marcher avec lui, aimer la bonté et pratiquer la justice est tout aussi difficile. Et que dire de l’humilité, cette vertu devenue si rare dans un monde de « présomption absolue » où tout le monde sait tout au sujet de tout… Comme nous sommes loin de la sagesse de saint Isaac le Syrien qui, humblement, proclamait : « L’humilité est pour toute vertu ce qu’est le sel pour tout aliment. » Que ne nous inspirons nous pas de lui lorsqu’il affirme, qu’au contraire : «La présomption disperse l’âme dans la rêverie et l’amène à errer parmi les nuages de ses pensées, à parcourir ainsi toute la terre sans ordre et sans but, alors que l’humilité, au contraire, la rassemble dans le silence, l’amène à se concentrer en elle-même. » Ce n’est après s’être revêtu de cette vertu, au prix de cet effort, que l’homme peut, humblement, mettre ses pas dans ceux de son créateur et marcher avec lui.
Mais, vous le savez tous, frères et sœurs, le pessimisme est étranger au chrétien. Aussi, en ces temps d’individualisme exacerbé, d’indifférence généralisée, de recherche effrénée du gain et de toutes les formes d’égoïsme, mais en cette belle Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, je voudrais que nous tournions nos pensées vers tous ceux qui, répondant à cette invitation du prophète Michée, à l’imitation du jeune riche de l’évangile de saint Matthieu, et dans une grande humilité, ont renoncé à tout pour suivre le Christ et faire justice, en s’engageant concrètement au service de leur prochain.
Prions en particulier pour ces milliers de chrétiens, hommes et femmes de toutes confessions, laïcs et religieux, engagés dans des organisations caritatives et humanitaires, ou plus simplement dans le cadre de leur ministère, qui, dans les pays en voie de développement et ici, en France, par charité, par amour, « marchent avec Dieu et font justice » en servant leur prochain, indépendamment de ses croyances et de ses convictions.
Que leur marche nous inspire, nous aussi, et qu’à quelques jours de la lumineuse fête de la Présentation du Sauveur au temple, la Chandeleur, qu’elle éveille en nous de nouvelles vocations de « marcheurs du Seigneur », en particulier chez les plus jeunes d’entre nous. Amen.
Références bibliques :
Michée 6,6-8 ; Galates 3,26-28 ; Mt 25,31-46
Eglise-abbatiale Saint-Victor, Marseille
1 commentaire
” Marcher dans les pas du Seigneur pour rechercher son intimité et la proximité de nos frères en humanité, qu’ils soient chrétiens ou pas “.
” marcher avec lui, pour « faire le bien et la Justice » et gagner ainsi notre salut.
Marcher avec ” ces milliers de chrétiens, hommes et femmes de toutes confessions, laïcs et religieux, engagés dans des organisations caritatives et humanitaires, ou plus simplement dans le cadre de leur ministère, qui, dans les pays en voie de développement et ici, en France, par charité, par amour, « marchent avec Dieu et font justice » en servant leur prochain, indépendamment de ses croyances et de ses convictions.”
Voilà notre voie toute tracée:
Marcher dans les pas du Christ pou trouver son intimité,
marcher en proximité de nos frères en humanité
” pour faire le bien et la justice”.
en servant notre prochain, indépendamment de ses croyances et de ses convictions.”