Proverbes 8, 22-31
Psaume 8
Romains 5, 1-5
Jean 16, 12-15
Un enfant de sept ans à qui on demandait ce qu’était la Trinité, a répondu : « Tu ne sais pas ce que c’est ? Eh bien, je vais te l’apprendre : on ne peut pas aimer tout seul ! » Admirable ! Comment dire mieux sur l’intimité même de Dieu, ainsi que l’Eglise semble l’oser en cette fête de la Sainte Trinité, que ce mot d’excellent petit théologien ! Permettez-moi de dire, avec infiniment moins de justesse que lui, deux petites miettes de ce mystère de vie.
Première miette de l’amour trinitaire qui nous est offert en méditation ce matin : Dieu, qui est mystère, nous ouvre au mystère de tout homme. Dieu est mystère. Cela ne veut pas dire qu’on ne le connaît pas, mais qu’on n’aura jamais fini de Le connaître. La nuance est importante ! Plus ma familiarité avec l’évangile grandit, plus je me pose de questions sur Jésus : qui est-il donc pour bousculer ainsi les idées qu’on se faisait sur Dieu ? Qui est-il donc pour oser des paroles et des gestes pareils ? Dieu est mystère et nous ne découvrons qui Il est que lentement, progressivement, et parfois même douloureusement.
« J’aurais encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous n’avez pas la force de les porter », nous dit Jésus dans l’évangile de Jean. Dieu est mystère, et parce qu’Il est mystère, Il nous apprend la patience. Patience à l’égard de Dieu que je connais encore si peu… patience à l’égard de tout homme qui, lui aussi, participe au mystère de Dieu. Je ne connais aucun homme totalement… et il peut évoluer.
Reconnaître que Dieu est mystère et que tout homme, créé par Lui, participe de ce mystère, c’est quelque chose de très concret. C’est refuser de coller sur les gens des étiquettes et ne jamais désespérer d’eux. C’est considérer chaque homme avec un infini respect.
Deuxième miette de cet amour trinitaire : Dieu qui est amour me fait découvrir ce qu’aimer veut dire. Je retiens tout spécialement cette espèce de dynamisme centrifuge de l’amour. Loin de tout ramener à soi, il se trouve en se donnant. À travers les évangiles et la liturgie de l’Eglise, cela est flagrant : le Père, le Fils et l’Esprit… chacun renvoie aux deux autres et semble s’effacer pour mettre les autres en valeur.
Le Père ? … Lui que nul n’a jamais vu et que l’on ne peut donc pas représenter s’efface devant le Fils (dans le Symbole des Apôtres, deux lignes seulement pour le Père et dix lignes pour le Fils !). Il convoque l’Esprit dès sa première oeuvre (cf. les deux premières lectures) et lui donne une place de choix dans son oeuvre créatrice. Le Père ne fait rien sans l’Esprit.
Le Fils ? … Dans le « Gloire à Dieu », on le réfère tellement au Père qu’on dit de Lui : « Seigneur Dieu, Agneau de Dieu, le Fils du Père »… « le Fils du Père » ! … superbe pléonasme qui souligne l’impossibilité de parler de Jésus sans parler de Dieu son Père ! « Le Père, dit Jésus, est plus grand que moi » … et encore « non pas ma volonté, mais celle de mon Père ». Jésus renvoie toujours au Père et s’efface devant l’Esprit qu’il annonce et promet : « Il est bon pour vous que je m’en aille »… « l’Esprit vous donnera de faire des choses plus grandes encore ».
L’Esprit ? … C’est Lui qui nous fait nommer Dieu « Père » : « l’Esprit fait de nous des fils qui crions vers Dieu en l’appelant : ‘Abba!’ » . L’Esprit nous oriente vers le Père et nous renvoie toujours à Jésus : « Nul ne peut dire ‘Jésus est Seigneur’ si ce n’est sous l’action de l’Esprit ». L’Esprit nous fait reconnaître en Jésus le Christ.
Alors, si aimer c’était cela : ne pas chercher sa propre gloire, mais vouloir que l’autre grandisse, aime et soit aimé… alors, je peux me poser bien des questions sur ma manière d’aimer mes proches. Est-ce que vraiment je les aime pour eux-mêmes ou pour l’avantage que je pourrais en tirer ? Devant ce grand mystère du seul et unique Dieu qui est à la fois Père, Fils et Saint Esprit, faisons silence et rappelons-nous que puisque Dieu est Amour, c’est lui qui m’apprendra à mieux aimer les autres.
Source : http://www.kerit.be/homelie.php