Isaïe 42, 1-4.6-7
Psaume 28
Actes des Apôtres 10, 34-38
Matthieu 3, 13-17
La fête du baptême du Seigneur clôt le temps de Noël. On ne voit pas bien comment les évangélistes auraient pu inventer ce récit, car il leur posait une véritable énigme. Pourquoi le Christ, l’homme sans péché, aurait-t-il voulu être baptisé, lui qui n’avait nul besoin de purification?
Jésus descend donc de Nazareth (+300m) vers le fleuve Jourdain aux environs de Jéricho
(-250 m) ! En lui, c’est Dieu qui descend pour nous faire remonter. Ce mouvement de descente et de remontée, nous le trouvons déjà dans le Premier Testament :
« Moi, je descendrai avec toi en Egypte. Moi aussi, je t’en ferai remonter » (Genèse 46,4).
« Je suis descendu pour le délivrer de la main des Egyptiens, et pour le faire monter de ce pays dans un bon et vaste pays, dans un pays où coulent le lait et le miel… » (Exode 3, 8)
Devant le geste de Jésus, le baptiste recule : « C’est moi qui ai besoin de me faire baptiser par toi, et c’est toi qui viens à moi ! » De même, Pierre protestera semblablement : « Tu ne me laveras pas les pieds ; non, jamais ! » – « Si je ne te lave pas, tu n’auras point de part avec moi. » –
« Alors, Seigneur, pas seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête ! » (Jean 13, 8-9)
Jésus descendu au rang des pécheurs, plongé avec eux dans les eaux de la mort, c’est l’inouï de l’Amour du Dieu Unique et Trinité qui vient vers l’homme pour le faire renaître à la vie. Ce n’est donc pas pour lui, mais pour nous que le Fils de l’homme s’immerge dans les eaux du Jourdain, pour qu’avec lui, nous puissions y entrer et avec Lui en ressortir, vivants, nés une seconde fois de l’eau et de l’esprit. « Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché des hommes, afin que, grâce à lui, nous soyons identifiés à la justice de Dieu », dira Paul
(2 Corinthiens 5, 21).
Cette plongée et sortie de l’eau renvoie à des moments essentiels de l’alliance biblique : Noé et du déluge, sortie d’Egypte à travers la Mer Rouge, l’entrée en Terre Promise, à travers le Jourdain. Jésus, debout, surgissant du Jourdain apparait, tel un nouveau Josué, pour faire entrer les hommes, à sa suite, dans la vraie terre promise, notre demeure en Dieu, la demeure de Dieu en nous.
« Pour le moment, laisse-moi faire ; c’est de cette façon que nous devons accomplir parfaitement ce qui est juste. ». Etre juste, c’est être ajusté à la volonté de Dieu. En Jésus, Dieu s’ajuste à nous pour nous faire entrer dans la surabondance indicible de sa vie. La justice de Dieu consiste à descendre, par Jésus, jusqu’à nous pour nous tirer vers le haut, pour nous faire monter vers Lui.
« Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en lui j’ai mis tout mon amour. ». Baptisés, nous remontons des eaux de la mort par la puissance de l’Esprit et nous nous découvrons fils sous le regard du Père.
« Moi, le Seigneur, je t’ai appelé selon la justice, je t’ai pris par la main, je t’ai mis à part, j’ai fait de toi mon Alliance avec le peuple et la lumière des nations ; tu ouvriras les yeux des aveugles, tu feras sortir les captifs de leur prison, et de leur cachot ceux qui habitent les ténèbres. » (Isaïe 42, 1ère lecture)
A notre tour avons-nous à montrer le visage d’un nouvel aspect du visage miséricordieux de Jésus, que personne encore n’a dévoilé et qui nous est propre. On raconte qu’un petit garçon avait demandé à sa grand-mère en découvrant un vitrail d’une église : « Qui sont ces gens-là ? » – « Ce sont des chrétiens », avait-elle répondu. Peu après, au catéchisme, on l’interroge : « Qu’est-ce qu’un chrétien ? » Aussitôt la réponse de l’enfant a fusé : « C’est quelqu’un à travers qui on voit la lumière. » On ne peut mieux dire. Voilà notre mission.
Père Charles-André Sohier
Source : http://www.kerit.be/homelie.php