Genèse 12, 1-4a
Psaume 32
2 Timothée 1, 8b-10
Matthieu 17, 1-9
Le sourire, miroir de l’âme
Frères et sœurs, amis en Christ, qu’y a-t-il de plus beau au monde ? Pour certains, les sept merveilles… Pour moi, la beauté qui sauve le monde est celle du visage de Jésus, sur lequel se révèle le visage de Dieu. En ce jour de la Transfiguration, Dieu a un visage souriant, il l’offre à chacun.
Comme aux trois apôtres, en suivant Jésus sur la montagne, lieu traditionnel de la rencontre avec Dieu dans la Bible, il nous livre le secret pour redonner espoir aux blessés de la vie, du cœur et de l’esprit : le sourire.
Quelque chose de mystérieux est décrit dans l’Évangile que nous venons d’entendre, dont la narration heurte probablement notre sensibilité contemporaine. L’évangéliste Matthieu utilise les images venues des textes sacrés, pour nous signifier la rencontre de Dieu et de l’homme.
L’important pour les apôtres et pour nous, c’est de découvrir, à ce moment privilégié, Jésus comme le tout Autre, resplendissant de gloire, Moïse et Élie à ses côtés, accompagné par le sourire de Dieu.
Il faut comprendre le bonheur de Pierre, son vieux rêve de triomphe se réveille. Pourquoi ne pas s’installer dans cette divine lumière. Puisqu’on est si bien dans cette chaude ambiance, dressons des abris sur cette montagne bénie. Trop beau pour être déjà vrai. Pour le Seigneur, il n’y aura pas de tente avant la croix. C’est sur ce bois et dans le tombeau qu’il veut d’abord demeurer, amoureusement. Aux mêmes trois apôtres, qui devront le regarder en agonie à Gethsémani, il veut bien révéler un avant-goût de son visage pascal, pour les aider à supporter la terrible nuit, d’où sortira ensuite le soleil de la Résurrection, sa Transfiguration définitive.
D’ailleurs, la voix du Père s’est chargée de remettre rapidement les trois disciples sur le bon chemin. En attendant la Pâque promise, il reste beaucoup à faire : mieux écouter la parole du Christ, redescendre de la montagne et l’accompagner jusqu’au bout de l’amour.
Frères et sœurs, nous avons tous nos moments de Thabor, quand le succès, la foi, la santé, l’amitié nous habillent de fête. On est alors heureux de vivre, de croire, d’être aimé.
Mais nous savons que le bonheur comporte aussi ses pièges. On peut vouloir, comme Pierre, s’installer en lui, demeurer à l’écart des autres, pour mieux en jouir. On peut toujours chercher à se draper dans ses réussites, mais tôt ou tard, il nous faudra redescendre de la montagne pour affronter la réalité de la vie, avec ses jours de bonheur mais aussi de grisaille, passer par la mort, pour recevoir la gloire de Pâques, à laquelle nous sommes tous appelés.
En attendant ce jour, c’est dans le quotidien que nous pouvons déjà faire l’expérience de la Transfiguration.
Pour moi, aumônier d’hôpital, elle prend le visage du malade, que le personnel de nos hôpitaux regarde avec tendresse et soigne avec délicatesse. J’ai aussi devant les yeux cette maman qui, depuis des semaines, avec beaucoup de chaleur humaine et d’amour, quelquefois dans les larmes, le silence, mais aussi la confiance, accompagne sa fille de 12 ans atteinte de leucémie. Ce mari âgé qui, depuis 3 mois, inlassablement, vient tous les après-midi rendre visite à sa femme hospitalisée. L’échange de leur regard me dit le visage de Dieu.
Bien sûr, ce sont là des moments fugitifs, passagers, mais ce sont des instants privilégiés qui peuvent transfigurer l’épreuve de la maladie.
Frères et sœurs : le regard du Christ fait revivre ceux qui se croient abandonnés. Alors regardez-vous, regardons-nous ! Ton frère existe à partir du moment où tu poses sur lui un regard de bonté et un sourire. N’oublie jamais le rayonnement d’un sourire. Il est le miroir de ton âme. Amen.
Père Denis Ledogar, assomptionniste