Apocalypse 7, 2-4.9-14
Psaume 23
1 Jean 3, 1-3
Matthieu 5, 1-12a
La première lecture que nous avons entendue est tirée du livre de l’Apocalypse. Ici à Tamié nous le lisons en ce moment, en lecture continue, une page par jour, depuis un mois. Je vous avoue qu’il m’est arrivé de comparer ces pages à celles des journaux qui sont à notre disposition et que vous connaissez: des listes d’événements terrifiants qui, pas très loin de chez nous, retentissent dans notre quotidien.
Cela m’amène à réfléchir sur une question que, à mon tour, je vous adresse: n’avez-vous pas l’impression, parfois, qu’aujourd’hui, nous sommes plongés, tous, dans un monde qui perd les repères et qui a déjà perdu, en bonne partie, l’espérance ? Je veux dire que, parfois, on se croirait dans un univers où une tragédie se superpose à une autre : d’un tremblement de terre à une guerre, d’une épidémie à une tuerie… en attendant qu’une autre tragédie encore, plus grande, nous fasse oublier la précédente ? Et nous assistons, étonnés. Telle est, justement, l’ambiance décrite dans l’Apocalypse au fur et à mesure qu’on brise, l’un après l’autre, les sceaux du mystérieux livre attribué à sain Jean.
Mais ma question, n’est pas du tout posée pour en rajouter à un tableau déjà sombre, pour le goût d’augmenter ainsi notre angoisse qui monte ; plutôt elle voudrait nous responsabiliser, nous éveiller : Jésus nous a promis son retour. L’avons-nous oublié ? En effet, ce dernier livre de la Bible qui commence par ce mot : Apocalypsis Iésou Christou (Révélation de Jésus, le Christ), invite les fidèles du Christ à garder l’espérance, à tenir bon. Car, originairement, ce terme « apocalypse », ne voulait pas du tout dire catastrophe ou événement désastreux, mais plutôt : révélation en vue du salut ; autrement dit, ce texte propose de nous offrir une clé de lecture en vue d’une solution meilleure, d’une ouverture vers une perspective « autre ». Les catastrophes sont réelles, mais notre histoire doit être décryptée, éclairée, comprise. Elle va vers une solution heureuse. Pour la comprendre, il faut… changer de cap.
Aujourd’hui encore, des choix importants nous cernent et nous demandent des solutions. C’est un fait, c’est évident ! Des bruits de guerre surgissent de toute part autour de nous, dans ce monde devenu très petit. Des peuples entiers, pourchassés dans leur patrie, s’enfuient pour cherchent refuge ailleurs. Et souvent, en plus, sous nos regards hostiles : d’ici, nous nous sentons menacés par leur présence et nous suivons leur fuite affolée d’un regard soucieux, menaçant. Nous laissons ainsi que des injustices criantes s’imposent durablement autour de nous.
Et, tant qu’elles ne touchent pas nos intérêts, nous préférons fermer les yeux. L’Apocalypse nous demande de faire des choix, de nous engager.
Quant aux issues proposée par Jésus dans l’évangile que nous avons lu, admettons-le : elles sont paradoxales et déroutantes : « heureux les pauvres de coeur… », « Heureux ceux qui ne réagissent pas, coup sur coup, par la vengeance… », « Heureux ceux qui pleurent… », « Heureux les persécutés… ». Hum !… Mais, cela nous conduit où ?
Cette fête de Tous les Saints peut nous aider à mieux comprendre.
Comment ont-ils vécu tous ces témoins dont nous faisons mémoire aujourd’hui ? Quel genre de choix ont-ils fait, eux, pour être considérés par l’Eglise comme des lampes qui éclairent nos chemins ? Considérons leurs vies. Ils sont allés au delà des gratifications immédiates : ils ont vraiment crû à l’espérance annoncée par Jésus. Et, par là, ils ont fait beaucoup plus qu’appliquer des lois et des préceptes : animés par la grâce de Dieu, ils se sont mis librement en marche. Ils avaient peut-être la possibilité d’entasser des richesses, mais ils ne sont pas tombés dans le piège : ils ont préféré les mépriser pour en chercher d’autres, invisibles et durables. Ils ont cherché la justice, denrée rare dans un monde d’injustices, même quand elle leur coûtait cher (leur vie, peut-être) ; ils ont eu de Dieu, en retour, la miséricorde qu’ils ont accordé aux autres, ils ont construit la paix au milieu des guerres… Mais, encore plus (et c’est ça qui est important) : Ils ont fait de leur vie un désir.
C’est pour cela que Dieu les a appelés du nom de FILS.
Nous célébrons, aujourd’hui, la Communion des Saints. Comment être en communion avec les autres ? Il y a beaucoup de manières d’être avec. Je vous en cite une : chercher ensemble pour se sauver ensemble.
Une fois, un homme se perdit dans une forêt et il ne pouvait plus s’en sortir. Angoissé, affolé, il arriva à craindre pour sa vie. A un autre arriva la même chose : il se perdit lui aussi. Les deux se rencontrèrent. Le deuxième, terrorisé, dès qu’il le vit, s’adressa alors au premier : « peux-tu m’indiquer le chemin pour en sortir ? ». « Je ne le connais pas – dit celui-ci, mais ça fait une journée que je tourne ; je peux t’indiquer les chemins qui ne sont pas les bons. Ensuite nous allons chercher ensemble. Nous en sortirons !>
Frères, soeurs, pour être en communion entre nous, cherchons ensemble le bon chemin. Dieu nous aidera à le trouver.
Dom Ginepro, Abbé de Notre Dame de Tamié