En ce temps-là, Jésus disait à la foule : « Est-ce que la lampe est apportée pour être mise sous le boisseau ou sous le lit ? N’est-ce pas pour être mise sur le lampadaire ?
Car rien n’est caché, sinon pour être manifesté ; rien n’a été gardé secret, sinon pour venir à la clarté.
Si quelqu’un a des oreilles pour entendre, qu’il entende ! »
Il leur disait encore : « Faites attention à ce que vous entendez ! La mesure que vous utilisez sera utilisée aussi pour vous, et il vous sera donné encore plus.
Car celui qui a, on lui donnera ; celui qui n’a pas, on lui enlèvera même ce qu’il a. »
Marc 4,21-25
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L’Evangile est une Bonne Nouvelle. Mais celui d’aujourd’hui résonne dans mon cœur avec une note de tristesse.
Oui, le Seigneur a voulu allumer la lampe de ma foi. Oui, je pense que mes oreilles se sont largement ouvertes, depuis une vingtaine d’années, pour entendre sa Parole. Et tout cela est beau et bon.
Oui mais…
Au quotidien, je suis contrainte à tout cacher sous le boisseau. Et plus les années passent, plus cette pression se durcit. Je suis fonctionnaire de la République laïque. A ce titre, je suis soumise à l’article 11 de la charte de la laïcité à l’école :
11. Les personnels ont un devoir de stricte neutralité : ils ne doivent pas manifester leurs convictions politiques ou religieuses dans l’exercice de leurs fonctions.
Cela peut sembler tomber sous le sens. Et d’ailleurs, je l’ai presque toujours implicitement respecté. Mais je dois dire que ces derniers mois, cela nous est martelé de manière obsessionnelle. Cette année scolaire, les formations continues sont axées sur ce devoir de stricte laïcité. Hier, il nous a été dit en conférence pédagogique :
“Le programme d’éducation morale et civique devrait être votre Bible de chevet.”
Ah bon ? Même chez moi, je devrais donc remiser mes trois bibles pour me consacrer à l’étude de la morale républicaine ? Et si je trouve que la Bible m’enseigne bien mieux en matière de morale et de vivre ensemble, je n’ai plus le droit de le penser ?
Ce devoir de neutralité va loin : nous sommes par exemple censés enseigner que les fêtes de Noël trouvent leur origine dans le solstice d’hiver. On nous encourage à lire des ouvrages pour nous former à cet enseignement véritablement laïc.
Je suis pleinement consciente que dans les écoles à public multiculturel, la laïcité est la meilleure garante d’un bon vivre ensemble. Mais il se trouve que chez moi, tous mes élèves sauf un – dispensé – suivent l’heure d’enseignement religieux catholique pendant les heures de classe (je vis en département concordataire). Les rares enfants qui vont à la messe m’y voient faire la lecture et prier. Mais quand je suis confrontée à un élève qui vit un deuil difficile ou qui se pose des questions sur la mort, aucune parole d’espérance ne m’est autorisée. Je me dois d’être neutre. J’ai mon tablier de hussarde noire de la République, et ce qui sauve, c’est “Liberté-égalité-fraternité”. C’est au point que j’ai peur de faire une faute professionnelle quand je parle en histoire des années avant ou après Jésus-Christ. J’avais un élève, il y a longtemps, qui avait écrit : en 52 avant Jules César… Peut-être bientôt la nouvelle norme ?
Je crois bien qu’en écrivant ce billet, je prends un risque. Ma foi chrétienne n’est pas la bienvenue dans mon milieu professionnel. Quelle serait la sanction, si ma hiérarchie tombait dessus ? Je n’en sais rien. Par contre, j’ai conscience qu’on n’est pas obligé d’être un chrétien d’Orient pour se sentir menacé dans sa foi…
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L’autre jour, j’ai encore dû ravaler ma neutralité. Une nouvelle élève dans ma classe, qui arrive avec une histoire personnelle bien lourde, voulait partager avec ses camarades et moi un livre qu’on venait sans doute de lui offrir et qu’elle aimait beaucoup. Elle me le tend, je vois qu’il s’agissait d’une histoire biblique pour enfants. Je lui ai expliqué que je ne pouvais pas lire ce genre d’histoire à la classe, mais – sauvée par le statut concordataire ! – je lui ai proposé de le montrer à l’intervenante de religion, ce qu’elle a fait dans l’après-midi. Ils ont donc regardé le livre et écouté le CD pendant cette heure. C’était important pour cette petite fille d’être prise en compte et un peu valorisée à ce moment-là. Quand elle m’a dit : “Moi j’aime bien la religion”, j’ai été émue, et j’ai pensé à tous ces enfants qui étaient, ailleurs en France, laissés dans l’ignorance totale des choses de Dieu…