À vrai dire, des femmes de notre groupe nous ont remplis de stupeur. Quand, dès l’aurore, elles sont allées au tombeau,
elles n’ont pas trouvé son corps ; elles sont venues nous dire qu’elles avaient même eu une vision: des anges, qui disaient qu’il est vivant.
Quelques-uns de nos compagnons sont allés au tombeau, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit ; mais lui, ils ne l’ont pas vu. »
Il leur dit alors : « Esprits sans intelligence ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce que les prophètes ont dit !
Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela pour entrer dans sa gloire ? »
Et, partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait.
Luc 24, 22-27
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Je n’ai retenu ici qu’un extrait du très bel évangile de la route d’Emmaüs (Luc 24, 13-35) que nous méditons aujourd’hui en Eglise.
Il y aurait beaucoup à dire sur l’aventure des disciples d’Emmaüs. Je voudrais pour ma part m’arrêter sur le fait que les femmes qui accompagnaient souvent les disciples n’ont pas été crues par eux.
Un peu plus haut, nous pouvons lire, au moment où les saintes femmes rapportent aux disciples ce qu’elles ont vu au tombeau – sa vacuité et le message des deux anges qui leur annoncent que le Christ est ressuscité – “Mais ces propos leur semblèrent délirants, et ils ne les croyaient pas.” (Luc 24, 11)
Que de parallèles bibliques et de l’histoire de l’Eglise pourrait-on faire !
Anne, la future mère de Samuel, qui prie et pleure abondamment sur sa stérilité à l’entrée du sanctuaire et le prêtre Eli qui la prend pour une femme ivre, méprisant d’abord sa prière sincère (1Samuel 9-18).
La Vierge Marie, ayant vécu l’Annonciation, que son fiancé Joseph envisagera de répudier car il la croit adultère (Matthieu 1, 18-20).
Tant de femmes qui ont cherché à approcher Jésus avec sincérité et qui ont été rabrouées par les disciples ou les hôtes du Seigneur.
Et à travers toute l’histoire de l’Eglise, celles qui sont aujourd’hui étonnamment canonisées ont parfois été lourdement condamnées par des tribunaux ecclésiastiques ou poursuivies par l’Inquisition, Jeanne d’Arc ou Thérèse d’Avila par exemple pour ne citer qu’elles.
Comment expliquer cette méfiance intrinsèque de l’homme pieux pour la parole prophétique de la femme ? Est-ce de la jalousie spirituelle, un excès de rationalisme ou une forme primaire, même déguisée, de misogynie ? Ou les trois à la fois ? Je crois que cela a aussi à voir avec l’orgueil et l’immobilisme de certains clercs bien établis. Ils détestent, et la révélation divine en atteste de bout en bout, être bousculés dans leurs doctrines bien ficelées.
Jésus a eu fort à faire contre les gardiens de la Loi de Moïse.
De nos jours, et cela fait même partie des critères de discernement des révélations privées, une femme ne sera écoutée et prise en considération par l’Eglise catholique que si ce qu’elle reçoit du Seigneur est en parfaite conformité avec tous les dogmes et le catéchisme. Comme si ceux-là avaient été rédigés par la main même de Dieu ! Or nous savons bien que la théologie et le catéchisme sont des empilements de doctrines humaines plus ou moins inspirées, qui plus est, presque exclusivement mises sur le papier par des hommes masculins.
En 2000 ans, pas grand-chose n’a changé.
“Mais ces propos leur semblèrent délirants, et ils ne les croyaient pas.”
L’évangéliste a écrit ces mots sans concession à propos de l’événement majeur de la Révélation divine : la résurrection du Seigneur Jésus.
Ayant moi-même tant de fois été considérée comme délirante, je n’ai plus rien à perdre.
J’ajoute donc que concernant l’autre événement majeur de la Révélation, à savoir le retour en Gloire du Christ Jésus, le Seigneur Dieu pourrait bien agir de même : faire fi des doctrines et des autorités, et annoncer à une femme considérée par tous ou presque comme délirante des mystères cachés aux esprits sans intelligence et aux cœurs lents à croire, pour reprendre les mots mêmes de Jésus …
Image : Les saintes femmes au tombeau Fra Angelico