J’ai beau être une chrétienne – catholique – fidèle à l’Eglise de mon baptême et passionnée par les Ecritures, connaissant les recherches sur l’évolution progressive de l’hominidé vers l’homo sapiens sapiens à travers des millions d’années, je ne peux croire qu’il y ait eu un jour sur cette terre-ci un Eden, et donc une “chute” des premiers parents. La recherche et l’observation des espèces animales les plus proches de la nôtre nous montrent bien plutôt que l’être “femelle” a toujours été sous la domination parfois violente de l’être “mâle” avec ses pulsions égocentriques et son désir désordonné de se reproduire.
Si Eden il y a eu, ce ne peut être que dans le sein du Père. Là étaient les prémices de l’unique masculinité parfaite qui donnera l’incarnation du Christ Jésus, et de la féminité aimée du Père dès l’origine et parfaitement complémentaire du Rédempteur qui se manifeste dans la Ruah. Ces deux-là quittent l’Eden éternel du sein du Père pour se confronter à l’iniquité du monde. Nous savons bien ce que les hommes ont fait du Christ Jésus il y a 2000 ans – et aujourd’hui encore – tandis que bien des femmes sur son chemin ont été pour lui reconnaissance et consolation.
“Ô Marie conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous !”
Et si, depuis quelque 200 ans, l’Eglise catholique s’était profondément trompée sur l’interprétation de cette prière donnée à l’humble Catherine Labouré par la Mère du Sauveur rue du Bac à Paris ?
Car Marie n’est pas tant différente de toutes ses sœurs en humanité que n’est différent le Christ Jésus de ses frères en humanité. Car enfin, observons un peu l’être féminin, depuis la fillette jusqu’à la femme rendant son dernier souffle. Qui connaît des femmes meurtrières en série, provoquant et menant des guerres, déclenchant l’arme nucléaire, étant prêtes à tuer pour conquérir un bout de territoire, commandant et instruisant la formation des grands terroristes, organisant au sommet les trafics de stupéfiants, qui connaît des femmes dictateurs au XXe siècle et avant, qui connaît des femmes ayant perpétré les grands génocides de l’histoire ?
Je ne veux pas dire par là que toutes les femmes soient sans péché. Mais conçues, toutes, dépourvues de l’intention congénitale de dominer et de nuire, elles le sont. Et leurs propres péchés font du tort à autrui, c’est sûr, mais jamais dans la proportion démesurée du péché lié à une virilité qui donne libre cours à ce qu’il y a de pire en elle. Saint Paul lui-même le disait dans sa Lettre aux Romains au chapitre 7 :
18 Je sais que le bien n’habite pas en moi, c’est-à-dire dans l’être de chair que je suis. En effet, ce qui est à ma portée, c’est de vouloir le bien, mais pas de l’accomplir.
19 Je ne fais pas le bien que je voudrais, mais je commets le mal que je ne voudrais pas.
20 Si je fais le mal que je ne voudrais pas, alors ce n’est plus moi qui agis ainsi, mais c’est le péché, lui qui habite en moi.
21 Moi qui voudrais faire le bien, je constate donc, en moi, cette loi : ce qui est à ma portée, c’est le mal.
22 Au plus profond de moi-même, je prends plaisir à la loi de Dieu.
23 Mais, dans les membres de mon corps, je découvre une autre loi, qui combat contre la loi que suit ma raison et me rend prisonnier de la loi du péché présente dans mon corps.
24 Malheureux homme que je suis ! Qui donc me délivrera de ce corps qui m’entraîne à la mort ?
©AELF
Ecrivant cela, il parlait en homme masculin, n’ayant pas conscience que nous autres femmes ne sommes pas “conçues” sur le même modèle. Notre propre péché, souvent, c’est de vouloir plaire à notre vis-à-vis masculin, et ce faisant, nous tombons dans les pièges de la séduction qui entraînent aussi jalousie et médisance. Nous nous renions nous-mêmes pour lui être agréable, ajustée à ses désirs à lui. Nous sommes même prêtes, parfois, à refuser la vie en nous pour ne pas perdre ou gêner un géniteur qui lui, n’a pas grand souci de sa paternité qui le flatte mais ne lui donne pas forcément le sens des responsabilités qui en découlent.
Tout le discours et la doctrine de l’Eglise mettent sur un pied d’égalité l’homme et la femme quant au péché. C’est le mythe de la fameuse “chute” des origines, qui a d’ailleurs incité nombre de Pères de l’Eglise et de théologiens à insister lourdement sur le péché de la femme et à minimiser celui de l’homme. Les catholiques les plus conservateurs se réclament encore de cette analyse. Ils n’ont que le thème de l’avortement à la bouche pour diaboliser les femmes et se défausser de l’évidence de leur propre nature bien plus coupable. La femme en marche vers la sainteté intègre ce discours et bat sa coulpe en permanence. Les autres se révoltent aujourd’hui jusqu’à vouloir ressembler à leurs vis-à-vis masculins, même dans leurs pires défauts.
Dans ce chaos, j’ose une voix libre. Je ne cherche à plaire à personne ni à séduire qui que ce soit. De toute ma vie, je n’ai recherché que la vérité. Et je l’ébauche ici, dans une profonde communion de cœur avec le Christ Jésus, mon Amour et Sauveur.
Image : Caïn et Abel Joseph Vergara XIXe