Homélie du dimanche 22 juillet 2012 à l’abbaye de Tamié
Frères et soeurs, ce passage d’évangile arrive à point nommé en ce mois de juillet. La parole du Seigneur aux Apôtres : « Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu », nous offre l’occasion d’une brève méditation sur les vacances. Jésus propose aux Douze un temps de repos et de calme dans la solitude, mais aussi un temps de réflexion en sa compagnie, une sorte de retraite spirituelle. Voilà un beau programme de vacances que le Seigneur propose aussi à chacun de nous. Ne vaut-il pas la peine de passer quelques jours de vacance avec Jésus ? Cela est tout à fait possible et à notre portée. Il n’est pas nécessaire à cette fin de faire retraite dans un monastère ou de partir en pèlerinage, bien que ce ne soit pas interdit non plus, loin de là ! Cependant, même dans un cadre qui n’est pas expressément religieux, nous pouvons bien remplir le loisir que les vacances nous offrent. Si nous avons la chance de passer quelques jours à contact de la nature, soit à la campagne, soit au bord de la mer ou en montagne, comme ici, sachons redécouvrir la beauté de la création. Mais, pour cela, il est nécessaire de suivre l’invitation de Jésus : « Venez à l’écart dans un endroit désert. » Il faut fuir les endroits bruyants, bondés, pleins de mondanité, de vanité et de gaspillage, qui ne reposent ni notre corps ni notre esprit. Il faut trouver des lieux de silence et de paix, où la beauté de la nature nous parle spontanément de la beauté de Dieu, de sa grandeur, de son amour. Il s’agit de réapprendre un art si oublié aujourd’hui et pourtant si nécessaire à notre équilibre humain et spirituel : l’art de contempler. Ouvrir les yeux sur la beauté de la création qui nous entoure : la fleur, l’arbre, le papillon, l’azur du ciel, toutes les merveilles que Dieu a répandues avec largesse. Et puis, laisser monter sur nos lèvres les paroles d’adoration et de louange, les paroles des psaumes par exemple, comme celles du Ps 91 : « Tes oeuvres me comblent de joie ; / devant l’ouvrage de tes mains je m’écrie : / Que tes oeuvres sont grandes, Seigneur ! / Combien sont profondes tes pensées ! »
(Ps 91, 5-6)
Mais aussi, pourquoi ne pas profiter du loisir des vacances pour nous mettre à l’écoute de la Parole de Jésus ? Sa Parole est toujours à notre disposition. Elle nous a été transmise par les quatre petits livres des Évangiles, c’est-à-dire, bonnes nouvelles, heureuses nouvelles, nouvelles de bonheur, heureuses surprises ! Ces quatre petits livres sont notre trésor, et cependant bien des chrétiens ne les ont jamais lus en entier. On se contente d’une écoute plus ou moins attentive, parfois plus ou moins distraite, à la Messe du dimanche. Quel dommage !
Et si nous prenions le temps de lire l’Évangile, lentement, tranquillement, un peu chaque jour, en goûtant chaque phrase comme on écoute de la musique ou comme on sirote un vin délicieux, sans chercher à en tirer tout de suite une leçon de morale ou une solution immédiate à nos problèmes ? Si nous laissions résonner en notre coeur la Parole de Jésus pour nourrir notre foi et notre prière, pour nous imprégner de cette Parole, demeurer en elle, afin qu’elle devienne notre lumière et notre chant, comme dit le psaume 118 (v. 105 et 54) ?
« Jésus se mit à les instruire longuement », dit l’évangile. Cette foule désemparée qui se presse autour de Jésus a soif d’une parole de vie. N’est-ce pas la soif de beaucoup d’hommes et de femmes aujourd’hui, surtout en Occident ? Oui, frères et soeurs : tous nos biens matériels, tous nos progrès technologiques, si utiles et si bienfaisants qu’ils soient, ne peuvent pourtant pas combler le désir profond de notre coeur, notre recherche d’un sens à la vie qui aille plus loin que l’argent ou le plaisir. Que de gens sont en quête de maîtres spirituels ! Et beaucoup s’égarent dans des voies sans issue : les sectes, l’ésotérisme… Ou bien ils cherchent par bribes dans des exotismes spirituels lointains ce qu’ils pourraient trouver en abondance tout près d’eux, dans la tradition spirituelle chrétienne. L’Occident est comparable à un homme qui se meurt de soif à côté d’une source.
Frères et soeurs, revenons nous désaltérer à cette source limpide, seule capable d’étancher notre soif : la Parole de Dieu qui s’est faite chair en Jésus-Christ. Faisons silence dans notre coeur pour écouter ce que Jésus veut nous dire longuement. Alors nous recevrons de lui l’eau vive jaillissant en vie éternelle.
Amen.
Frère Raffaele
Source : http://www.abbaye-tamie.com/la_communaute/la_liturgie/homelies_tamie/homelies-2012/homelie-to-16/vue