La voix se raconte encore
Mais par moments
Les mots restent prisonniers
Au fond des souvenirs blessés
Le beau émerge aussi
Sous ses yeux, la photo de son mariage
Avec l’unique qu’il ait chérie
Je lui demande de me raconter leurs débuts
Il se souvient de la maison d’en face
Où elle visitait sa marraine
De leurs regards qui se croisaient
Leur premier face à face
Les bals intimidants
La certitude que c’était elle
Que c’était lui
C’est beau d’être née d’elle, et de lui
Comme l’évidence d’un mariage qui durerait jusqu’à la mort
D’elle, il n’a plus que des photos
La reverra-t-il ?
Son cœur ne sait plus
Sa foi ne répond plus
Alors je caresse longuement son bras chétif
Et je lui dis qu’elle l’attend à bras ouverts
Comme dans leur jeunesse
Et même la haie d’honneur pour lui, là-haut
Quand il arrivera
Bientôt
Bientôt
Il attend, il espère
Mais il est long le chapelet des jours
Sans plus d’appétit
Les comprimés, les injections, les régressions
Il se cramponne à sa dignité
Mais qu’il est long, le chapelet des jours !
Il n’a pas peur, non
S’il y a quelque chose après, c’est bien
S’il n’y a rien, c’est bien aussi
Mais quitter ceux qu’il aime
Voilà une fameuse épreuve !
Comment il s’appellera ce petit ?
Ce petit que sans doute, ses yeux ne verront plus
Ils ne pleurent pas ses yeux aujourd’hui
Je suis là
Nous sommes là tous les jours
Et des vélos lui donnent le réconfort d’un petit tour
Ça l’intéresse encore
Une dernière fois, il le sait bien
Ces hommes si courageux
Et ces paysages fabuleux
Voilà, il est là, dans ce lit, devant cette télé
Avec le beau portrait de mariage qui remplit tout l’espace du mur
Ils ne pleurent pas, mes yeux
Non, seulement ce soir
Quand il ne pourra pas le voir
Et que mon cœur saignera de tant l’aimer
Pour de vrai
Un peu de temps encore
Un peu de temps
Véronique Belen Août 2020
2 commentaires
Bonjour VÉRONIQUE.
Lorsque j’ai lu la première fois votre poème pour votre cher papa , j’avais les yeux tellement remplis de larmes que je ne voyais presque plus les mots.
Puis je l’ai relu plusieurs fois, en y prenant même du plaisir.
Car voyez vous, je me revoyais aux côtés de ma maman, il y deja 5 ans.
Et LA HAUT quelque part son bien aimé l’attendait depuis 38 longues années.
J’espere que “ce petit” il va le connaitre.
Bon courage a vous TOUTES et TOUS.
Merci Arlette pour ce commentaire qui me touche énormément !
“Ce petit”, il l’aime déjà, comme il chérit son grand frère, et quoiqu’il arrive, leur Pépé vivra toujours en eux…
Bien amicalement,
Véronique