Seigneur, quand tu exauces
Qui serais-je pour dédaigner ton exaucement ?
Tant de fois je t’ai prié ainsi :
“Ne me donne ni la richesse, ni la pauvreté !”
Et je me rebellerais contre ton exaucement ?
Seigneur, jamais mon corps n’a connu la faim
Et j’ai un toit plus qu’agréable pour abriter mes jours.
Toi qui n’avais pas même une pierre pour reposer ta tête, dis-moi :
Qu’est-ce que la pauvreté ?
Est-ce seulement reposer sur un coin de rue,
Etre balloté sur un bateau qui ne mènera à nul mieux-vivre ?
Est-ce seulement être sans travail et sans perspectives
Et n’avoir pas de quoi se vêtir décemment ?
Ou est-ce aussi, Seigneur, travailler dur au long des jours
Et ne parvenir qu’à payer ses factures ?
Est-ce aussi avoir espéré une vieillesse simplement digne
Et voir se profiler encore et encore l’injuste précarité ?
“Ne me donne ni la richesse, ni la pauvreté !”
Je t’avais demandé, Seigneur, ni l’une, ni l’autre,
Mais trop souvent l’autre prend le pas sur la première,
M’arrachant à la tranquillité des jours,
Me condamnant à soustraire des chiffres rouges…
“Ne me donne ni la richesse, ni la pauvreté !”
Oh Seigneur, tu m’as bien exaucée
Dans mon vœu de boire à la coupe de mes sœurs en humanité,
De partager jusqu’à la lie leurs tourments
Quand le labeur ne suffit plus pour joindre les deux bouts
Et que l’Eglise, indifférente, poursuit sa route froide,
Focalisant son discours sur celui qui n’a rien
Pour dédaigner celle qui donne tout
Et qui jamais n’en conserve aucun bien.
Véronique Belen
Septembre 2018